L’instabilité politique en Afrique ne semblant pas vouloir s’apaiser de sitôt, l’opportunité de voir un Festival International du film des droits de l’homme se tenir à Yaoundé au Cameroun semblait annonciatrice d’une embellie du point de vue des libertés individuelles. Du moins dans la théorie, ce festival qui devait se tenir ce mois-ci dans certains quartiers populaires de la capitale, prenait la forme d’une voix claire et porteuse d’espoirs au milieu d’un brouhaha incompréhensible.

Mais la voix s’est tue, brutalement, coupée dans son élan par la main du gouvernement. Une poignée d’heures seulement avant la première projection prévue le 12 avril, les organisateurs du festival ont vu débarquer deux cars de policiers anti-émeute sur le terrain du Bénoué Bar. Vincent Mercier, le directeur du festival, s’est alors vu remettre un arrêté préfectoral signifiant l’annulation de l’autorisation de manifestation publique.
Les dix-sept projections de film prévues gratuitement dans le cadre du festival sont alors annulées. Ceux qui espéraient clamer leur amour des droits de l’homme sont repartis la gorge nouée.
La plupart des raisons invoquée par les responsables camerounais ne sont que des excuses maladroites renvoyant à des soi-disant vices de forme qui sont récusés point par point par Vincent Mercier sur le site internet de l’Allicance-Ciné, co-organisatrice de l’évènement financé par l’Union Européenne.
La raison majeure de cette atteinte évidente à la liberté d’expression est la crainte des autorités nationales de devoir faire face à d’éventuels débordements. On le comprend : que la population s’interroge trop fortement sur l’application des principes des droits de l’homme dans son propre pays pourrait rendre nerveux n’importe quel président "élu démocratiquement" depuis près de trente ans.
Critiqué à plusieurs reprises déjà par Amnesty International, le régime de Paul Biya continue de chanter sa propre gloire, étouffant dans l’œuf toute tentative de changer de refrain. La mélodie totalitaire ne souffre aucune dissonance.