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L’IMA nouveau est arrivé ! Extension du domaine de l’Institut du monde arabe !

lundi 6 mai 2019, par Expositions

Quel dommage que l’institution n’ait pas saisi l’occasion de sa profonde refonte et de ses 25 ans pour modifier son nom et devenir l’Institut des mondes arabes ! Cela aurait davantage signifié l’évolution du projet de l’établissement, conceptuellement repensé.

L’Institut du Monde arabe, imaginé par l’architecte Jean Nouvel, est ce strict et splendide édifice sur les quais Rive gauche, qui paraît être, comme le restaurant la Tour d’Argent, tiré dans son sillage par Notre-Dame de Paris. Orientation pouvant prêter à confusion…

Financée par 22 pays arabes et la France, cette fondation fut inaugurée en novembre 1987 par le président François Mitterrand. Sa mission initiale était, avait-on dit à l’époque, de présenter et de faire connaître l’art islamique et, ces limites posées, rayonner la culture arabe. Cela restait un poil « orientalisant  », et sentait ses XIXe et XXe siècles.

Dans cette « prime enfance  » muséale, l’IMA s’était vu confier par le Louvre une grande partie de la collection qu’il présentait au public. Oui mais… Le Louvre va prochainement ouvrir son nouveau département des Arts de l’islam, et s’il récupérait ses objets, la concurrence aurait été par trop inégale.

Le Coran, Égypte, 1390-1400, encre, gouache et or sur papier Paris, musée de l’IMA

Et c’est ainsi, peut-on supposer, que le rôle du musée de l’IMA devint, après un colossal travail de synthèse qui mit à contribution les anthropologues, les historiens, les historiens de l’art et des religions, les archéologues, les ethnologues, les philosophes et les linguistes, de ne plus se limiter aux arts de l’islam, mais aux cultures des sociétés arabes, comprises dans toutes leurs acceptions historiques comme géographiques. Donner à voir le multiculturalisme du monde arabe.

Ainsi l’Institut du monde arabe (IMA) considère-t-il que son propos couvrira désormais l’aire géographique, comme toute l’étendue de l’histoire et de la préhistoire des 22 pays arabes cofondateurs : Algérie, Arabie saoudite, Bahreïn, Djibouti, Égypte, Émirats arabes unis, Irak, Jordanie, Koweït, Liban, Libye, Maroc, Mauritanie, Oman, Palestine, Qatar, Somalie, Soudan, Syrie, Tunisie, Comores et Yémen.

Le passé préislamique des pays arabes est convoqué, ainsi que la diversité des cultures, des langues, des croyances, et des modes de vie qui ont cohabité sur cette aire au fil des temps…

© NKB Architectes & Associés / / Roberto Ostinelli

La scénographie a été rafraîchie et allégée par Roberto Ostinelli. Dorénavant, on progressera par thème, même si la chronologie pointe encore parfois le bout de son nez….

Pour Marie Foissy, conservatrice en chef du patrimoine et chef du projet de refonte du musée, l’élaboration de l’identité arabe est antérieure à l’islam : «  Nous avons tenté de la lier tant aux cultures préhistoriques qu’aux civilisations antiques qui se sont succédé : mésopotamienne, égyptienne, perse, grecque, romaine, byzantine.  »

La pièce la plus ancienne (7e millénaire av. J.-C.) provient d’Aïn Ghazal, un site néolithique jordanien : une statue en argile de 10 cm de haut de la déesse-mère, symbole universel de fertilité, au ventre rebondi.

Il semble également que l’IMA (comme le Louvre ?) soit lancé dorénavant en pleine mondialisation, et ait à s’habituer à davantage d’échanges, et à des modifications de groupement de partenaires selon les opérations qui seront entreprises. Ainsi le Koweït s’est-il engagé dans les travaux de rénovation de l’IMA à hauteur de 2M€, la Fondation Jean-Luc Lagardère de 1M€, et l’Arabie saoudite de 0,5M€, sur un coût total de 5M€.

À l’entrée du musée, la fonction sas, considérée aujourd’hui comme indispensable à la mise en condition du visiteur, pour littéralement le « laver  » des influences et des sensations extérieures, se fait par la traversée d’une galerie qui bruisse d’un brouhaha de ruelles et de souks, un univers de sons et de couleurs, d’où émergeraient, si tant est qu’on en soit familier, des bribes de conversations ou de récits en arabe, en berbère, en amazigh, en araméen, etc.

Agher : terme amazigh, bouclier en peau d’antilope oryx, Touareg, Sahara central, Ahaggar, actuel sud algérien, peau, cuir, étoffe et fer Paris, dépôt du musée du Quai Branly

Le sommaire de l’IMA est en 5 parties.

 La première est consacrée aux « Arabies, berceau d’un patrimoine commun  », et Marie Foissy est fière de souligner qu’ « actuellement, aucun musée, même dans le monde arabe, ne fait cette synthèse de la civilisation arabe, avant et après la conversion à l’islam  ». La part belle est d’ailleurs réservée à la période préislamique. Capitales oasis, caravanes chargées d’encens et de la myrrhe, échanges intenses, prospérité des royaumes de l’Arabie Heureuse dont celui de l’orgueilleuse Reine de Saba. Portraits d’albâtre, stèles funéraires ornées de visages, datées des IIe et Ier siècles av. J.-C… Le terme d’ « Arabes  » apparaîtra pour la première fois au 1er millénaire avant J.-C., et la langue ne sera pas tout de suite écrite !
 La deuxième partie s’ouvre au sacré dans une ampleur plus monumentale et forcément davantage cultuelle. Ambiguïté du propos ou de cette nature de pensées ? Va-t-on alors vers l’œcuménisme, vers une forme d’universalité, ou bien les rites exerceront-ils une individuation de la communauté comme l’avance Michel Dousse, historien des religions ? Mais que se passe-t-il soudain ? Torah, Bible et Coran anciens n’accumulent-ils pas, jusque dans leur matérialité, de frappantes similitudes avec leurs précieuses enluminures de gouache et d’or ?
  Les villes seront le troisième temps du parcours muséal. Elles étaient les lieux privilégiés des prédications, elles sont aussi lieux de pouvoir, de commerce, d’artisanat, de science, d’enseignement et de poésie. Le labyrinthe est chez lui bien au chaud dans les cités arabes médiévales.
 La beauté méritait pleinement cette quatrième section, avec notre perpétuelle interrogation sur la représentation humaine. Les bustes des femmes des différents pays, des différences… L’art contemporain ici est notablement présent.
 La quatrième partie est d’une conception très mode : nous sommes en plein « Life Style  ». Coutumes, art de vivre, hospitalité, gastronomie, hammam, et… voile.

Torse de femme Arabie du Sud, Yémen. Albâtre, 58 x 35,5 x 15 cm environ Collection particulière

L’IMA dispose aujourd’hui d’un fonds d’œuvres conséquent :
 600 pièces d’art islamique ;
 400 d’art contemporain arabe ;
 un ensemble ethnographique ;
 encore 150 pièces prêtées par le Louvre, le quai Branly mais aussi des musées de Syrie, de Jordanie, de Tunisie, de Bahreïn et d’Arabie saoudite ;
 d’autres provenant de collectionneurs privés, dont celles de la Dubroff Family Collection, aux Etats-Unis ;
 et enfin… quelques icônes d’églises et de monastères de Syrie et du Liban.

Quatre expositions :
 Dégagements. La Tunisie un an après, jusqu’au 1er avril.
  Le Corps découvert, du 6 mars au 24 juin.
 25 ans de création, en octobre 2012 ;
 Mille et Une Nuits, en novembre 2012.

Sachons sortir du contexte tout en y restant : les meilleurs couscous et les tajines de légendes de Paris ne sont pas très éloignés de l’IMA. Le P’tit Caoua.

IMA (Institut du Monde arabe), 1 rue des Fossés-Saint-Bernard 75005 Paris 01 40 51 38 38 www.imarabe.org. Du mardi au vendredi de 10 à 18h ; jusqu’à 19h week-ends et jours fériés. De 6 à 8€.

André Balbo

sources : IMA, Le Monde, Connaissance des Arts, Libération