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DERNIERS JOURS de l’expo Newton : grandeur, style et cruauté d’un photographe

lundi 6 mai 2019, par Expositions

Il n’y avait eu aucune rétrospective de l’œuvre d’Helmut Newton en France depuis sa mort en 2004.

Bergstrom, au-dessus de Paris, 1976 © Helmut Newton Estate

Et c’était d’autant plus surprenant qu’il y avait travaillé notamment pour l’édition française de Vogue, et créé donc une partie conséquente de son œuvre, lui qui avait su restituer avec violence, force, érotisme et beauté ce qu’il voyait et ressentait des rapports sociaux des milieux de la mode, de l’argent et du pouvoir.

Jusqu’au 17 juin 2012, l’exposition Helmut Newton rassemble au Grand Palais plus de 200 images réalisées pour la plus grande part sous le contrôle du photographe, tirages originaux ou vintage : polaroids, tirages de travail de divers formats, œuvres monumentales, notamment dans la section Dressed/Undressed.

Un petit film, réalisé par June Newton, son épouse, est projeté, et des archives de presse viennent également enrichir l’exposition.

Les principaux thèmes newtoniens ponctuent le chemin de l’exposition, comme la mode, les nus, les portraits, le sexe, ou l’humour, souvent avec quelques aphorismes du photographe, cinglants, graves, parfois cruels, et toujours d’une réelle puissance conceptuelle, tels des enseignements que pourrait donner un maître samouraï de l’esthétique.

Pour Pascal Bruckner : "S’il choque ou fascine, ce n’est pas pour avoir inventé le porno chic ou recyclé la quincaillerie SM, ce qui n’est déjà pas mal en soi ; c’est pour avoir introduit une rigueur implacable dans une époque qui valorise la spontanéité et l’improvisation. Le scandale fut esthétique avant d’être érotique."

 Série Fashion : "Une bonne photographie de mode doit ressembler à tout sauf à une photographie de mode. À un portrait, à une photo souvenir, à un cliché de paparazzi..."
 Section Erotism : "J’adore la vulgarité. Je suis très attiré par le mauvais goût, plus excitant que le prétendu bon goût qui n’est que la normalisation du regard. (...) Les mouvements sado-maso, par exemple, me paraissent toujours très intéressants ; j’ai en permanence dans le coffre de ma voiture des chaînes et des menottes, non pas pour moi mais pour mes photos."
 Série Portraits : "J’aime photographier les gens que j’aime, ceux que j’admire et ceux qui sont célèbres, surtout quand c’est pour de mauvaises raisons."
 Section Specials : "J’aime et recherche les réactions. Je n’aime ni la gentillesse ni la douceur. La volonté de provocation ne répond pas au désir de provoquer, mais certains sujets me sont nécessaires afin de créer de nouveaux effets photographiques, de nouvelles tensions visuelles qu’ils m’autorisent."

Cette œuvre photographique peut aujourd’hui être considérée comme classique à plus d’un titre, car bien qu’elle se soit inscrite à l’intérieur de contraintes, elle laisse apparaître « l’expérience de la liberté, dans ses thèmes comme dans ses formats  » et donne à voir « une vision nouvelle et unique du corps féminin contemporain  ».

Il avait pourtant dit aussi : "Je ne suis qu’un sbire. Je ne cherche pas les musées".

Autoportrait avec June et modèles, Paris 1981 © Helmut Newton Estate

Pourtant, il avait fait donation de son œuvre à la France, mais les musées déclinèrent l’offre. Ne la jugeant pas suffisamment artistique ?

Les clichés de Newton laissent parfois percer de vraies amitiés, comme par exemple ceux, limpides, si francs, directs et simples, montrant Yves Saint Laurent lacé, Karl Lagerfeld, toutes fleurs jetées, Andy Warhol, dormant dans son manteau de cuir, ou le trop bel Helmut Berger, un camélia blanc à la boutonnière.

Sa cruauté d’équarrisseur est en revanche à son comble quand il saisit Leni Riefenstahl, prise en 2000 pour Vanity Fair, se repoudrant, le cheveu hirsute et toutes rides dehors ; ou les Wildenstein, en parfaits mafieux, costume ou chemise rayée, suffisants, hautains, pochettes au garde-à-vous, le regard méchant ; ou le tendre Jean-Marie Le Pen, pour The New Yorker, caressant ses attachants dobermans ; ou encore Salvador Dali, perdu dans ses rôles, vieillard intubé en robe de chambre de satin, écrasé au fond de son fauteuil par une grand croix quelconque dont le ruban barre sa poitrine.

Bizarrement, au regard de ses clichés aussi, sa phrase "Ma matière première, c’est la chair humaine" se vérifie encore, tout autant que dans les Nus domestiques ou les photos de muralistes des Dressed/Undressed.

La femme moderne montrée y aura-t-elle gagné en force ou en liberté quelque chose ?

British Vogue, Londres, 1967 © Helmut Newton Estate

La présentation de l’exposition précise que : « Nues ou en smoking, les femmes de Newton sont puissantes, séductrices, dominantes, jamais glaciales mais toujours impressionnantes, voire intimidantes. Ce sont des femmes qui, fortes de leur révolution sexuelle, assument la pleine liberté de leur corps, sans heurt ni cadre, ouvertes à tous les fantasmes. Ce sont des femmes riches, qui ont conquis le monde et son argent, et vivent dans un raffinement extrême, de leurs robes à leur lit. Luxe, classe et volupté : tel pourrait être l’adage de la Femme newtonienne.  »

Le climat social des années à venir ne risquera-t-il pas d’en changer fortement sens, messages et perspective ? Ou de faire encore plus entrer l’œuvre de Newton dans le classicisme d’une époque déjà exotique et un peu révolue ? L’histoire des images évolue si vite.

Grand Palais Galerie Sud-Est, entrée avenue Winston Churchill du 24 mars au 17 juin 2012 10 et 8€.

Vous retrouverez dans l’article « 2012 à Paris : les grandes expositions de A à Z  » les différentes expositions 2012 déjà annoncées par leurs établissements et musées, et dans l’article « Calendrier 2012 des grandes expositions à Paris  », ces mêmes expositions classées par dates.

David méditant devant la tête de Goliath, d’Orazio Gentileschi, huile sur lapis-lazuli, exposition Artemisia

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André Balbo

sources : visite, Helmut Newton, Rmn - Grand Palais, Pascal Bruckner