Entre le 7 avril et la mi-juillet 1994, en une petite centaine de jours, près d’un million de personnes périrent assassinè es au Rwanda. Elles représentaient les trois quarts de la population tutsi. Ce fut le dernier gè nocide du XXe siècle. Comment un crime d’une telle ampleur n’a-t-il pas pu être empêché ? Comment a-t-il è tè rendu possible ?
Le Mè morial de la Shoah, institution de rè fè rence en France et en Europe sur les questions liè es à l’extermination des Juifs d’Europe et aux autres gè nocides, est engagè depuis plusieurs annè es dans des actions d’enseignement et de sensibilisation à l’histoire du gè nocide des Tutsi.

Dans le cadre du 20e anniversaire de ce gè nocide, le Mè morial de la Shoah, avec l’association Ibuka France, consacre une sè rie de manifestations exceptionnelles dè diè es à cet è vè nement majeur de la fin du XXe siècle. 20 ans est une date, un repère, l’unité devient une génération...
Ibuka, qui signifie "Souviens-toi !", est une jeune et petite association de soutien aux rescapés, de partage et d’échanges, d’information et d’éducation, œuvrant sur le mémoriel et l’entraide. Elle est implantée en Belgique, en Hollande, en Suisse, et est représentée en France par Marcel Kabanda.
Du 11 avril au 5 octobre 2014, l’exposition "Rwanda 1994 : le gè nocide des Tutsi", en reproduisant à sa manière les mè moriaux rwandais, cherche à approcher cet è vè nement historique par une narration centrè e sur les objets, les archives sonores, vidè o ou è crites.
Les objets montrés ont été prêtés par les grands lieux mémoriels du Rwanda, comme Nyamata et Ntarama, qui furent des sites de massacres de masse. Ces objets ont appartenu à des enfants, des femmes, des vieillards, des adultes, des personnes dont le point commun était d’être tutsi.
Ces objets sont aussi les armes utilisés pour ces meurtres, outils quotidiens du monde agricole, masses, machettes, lames et piques de toute nature, auxquels s’ajouteront plus tardivement grenades et fusils.
Les massacres ont été souvent commis dans des lieux inspirant plutôt le refuge et la clémence : écoles, églises, hôpitaux, quand ce n’étaient pas les collines douces et verdoyantes du Rwanda dont aucune partie ne peut échapper au regard...
Ces massacres étaient intra-religieux, même intra-paroissiens. Au bilan, l’horreur de tels chiffres, qui devinrent performatifs, provient de la rencontre de deux logiques convergentes d’extermination : des pogroms localisés, à la brève violence, du temps d’une guerre civile qui laissait se développer une idéologie racialiste, et la flambée génocidaire qui ne put être stoppée que par la prise de Kigali.
N’imaginez pas que des traces écrites de cette période n’existent pas. La célèbre tradition orale africaine est une autre idée reçue concernant le Rwanda. Il existe une multiplicité de sources.
Cette exposition, concentrée dans 2 petites salles, concentre une information et des témoignages d’une rare intensité, et apporte des éléments d’analyse qui battent en brèche quelques idées reçues déjà bien ancrées.
Le génocide des Tutsi, une conséquence d’un antagonisme racial ancestral ? Selon les études archéologiques et linguistiques, Hutu et Tutsi vivent ensemble depuis au moins 2000 ans, mais la présentation de 2 races, qui ne repose sur rien, date des administrations et missionnaires allemands et belges qui firent, à la fin du XIXe siècle, des Hutu des nègres bantous et des Tutsi des nilotiques. Les Tutsi, supposés dès lors appartenir à la race supérieure, ont un accès prioritaire à l’éducation, et sont associés à la gestion du territoire et à la mission d’évangélisation.

Entre 1990 et 1994, pogroms et le génocide qui vient sont englobés sous le vocable de "guerre" menée contre l’ennemi intérieur. Il s’agit d’une "autodéfense civile". En fait, les familles tutsi fuient leurs maisons et leurs collines, interceptées sur les barrières, et progressivement dirigées vers les lieux de refuge, où elles seront exterminées par des milices appuyées par des gendarmes et des militaires.
Recueil des armes, souvent des outils agricoles, ayant servies au cours du génocide.
S’il y eut quelques morts hutu, seules des familles tutsi furent anéanties. Les enquêtes menées ultérieurement par la Fédération internationale des Droits de l’homme (FIDH) et par Human Rights Watch (HRW) démontrèrent que avant, pendant et après le génocide, les intellectuels hutu extrémistes pratiquaient la "propagande en miroir" qui consistait à justifier les tueries de Tutsi par la victimisation des Hutu...
Des troupes des Nations Unies (MINUAR), dirigées par le général canadien Roméo Dallaire, sont dépêchées au Rwanda pour remplacer les troupes françaises sur place depuis octobre 1990. L’engagement français avait été intense au point d’installer quelques fois une hiérarchie parallèle à celle de l’armée rwandaise. Les troupes françaises, lors de l’Opération Turquoise, comme le contingent belge et les hommes de la MINUAR n’interviendront pas au début du génocide pour faire cesser les massacres mais pour évacuer les expatriés. 10 casques bleus belges ayant été assassinés par des soldats de l’armée rwandaise, la Belgique encourage au repli international, et les effectifs de la MINUAR passent de 2 500 à 250 hommes, la moitié étant non combattants. Le génocide n’est plus présentée que comme une simple guerre interethnique.
La richesse et le grand intérêt d’une telle exposition résident dans la force des témoignages présentés, l’émotion que suscitent ces véritables reliques, tous ces objets de victimes, et la force des rencontres programmées autour de l’événement : cycle de films, colloque et témoignages.

Tas de vêtements de victimes, chacun ayant appartenu à une personne. Ils sont présentés ici comme ils le sont sur le site mémoriel. Un frêle bâton de berger, il en fallait bien deux pour se défendre des agresseurs, montre bien le déséquilibre que l’on imagine aux combats.
Un cycle de 7 films (entrée libre sur réservation au 01 53 01 17 42) du 18 avril à octobre 2014 sera organisé : paroles de rescapè s, mises en perspective historique, archives inè dites, ce cycle de films de fiction et de documentaires vient apporter un è clairage sur le gè nocide. Parmi eux, le rè cents 7 jours à Kigali de Mehdi Ba et Jè rè my Frey, ou encore Quelques jours en avril de Raoul Peck.
Un colloque (entrée libre sur réservation au 01 53 01 17 42) se tiendra le dimanche 25 mai 2014 : Rwanda : avril 1994. Les grands tè moins. Grands tè moins et scientifiques è changent sur le souvenir des tueries et la gestion du temps d’après pour apporter des è lè ments de connaissance sur la tragè die qui a rè vè lè , à la fin du XXe siècle, que les progrès des sciences n’avaient pas è puisè les ressources du racisme, et que celui-ci est singulièrement meurtrier. Avec notamment Bernard Kouchner, Marcel Kabanda, prè sident d’Ibuka France, Jean-Pierre Chrè tien, Stè phane Audouin-Rouzeau et Hè lène Dumas, historiens, ainsi que Richard Mugenzi et le Docteur Wolfgang Blam, tè moins.
Des témoignages : la parole des rescapés (entrée libre sur réservation au 01 53 01 17 42). La parole des rescapè s, sur le douloureux chemin de la mise en rè cit de la mè moire, fait le lien entre la què‚te du savoir, l’hommage aux victimes et au courage des survivants. Parmi les rescapè s prè sents pour tè moigner, EÌ lise Rida Musomandera, auteur de Le livre d’EÌ lise. Vingt ans après le gè nocide contre les Tutsi au Rwanda, une rescapè e tè moigne (è d. Les Belles Lettres, 2014).

Mémorial de Kibeho, Rwanda, 2001
Rwanda 1994 : le gè nocide des Tutsi. Du 11 avril au 5 octobre 2014, au Mémorial de la Shoah, 17, rue Geoffroy–l’Asnier 75004 Paris, 01 42 77 44 72. Tous les jours sauf le samedi, de 10 à 18h, et le jeudi jusqu’à 22h. Entrè e libre. Mè tro Saint-Paul ou HoÌ‚tel-de-Ville (1) ou Pont-Marie (7). www.memorialdelashoah.org/rwanda
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Vous retrouverez dans l’article 2014 à Paris : LES GRANDES EXPOSITIONS de A à Z les différentes expositions annoncées par leurs établissements et musées.
Frederic Leighton (1830–1896) Crenaia, the nymph of the dargle, ca. 1880 Huile sur toile 76.2x26.7 cm Colección Pérez Simón, Mexico © Arturo Piera, Musée Jacquemart-André 09/13-01/14
Dans CALENDRIER 2014 des grandes expositions à Paris, ces mêmes expositions sont classées par dates.
Nous nous efforçons de tenir ces articles à jour, et nous vous remercions des suggestions, précisions, ajouts et corrections que vous pourriez apporter à ces programmes.
Nous vous indiquons chaque semaine les nouveautés, les expositions qui fermeront bientôt leurs portes, et... nos préférences, car on ne se refait pas : LA SEMAINE des expositions, musées, et galeries : que faire à Paris du....
Enfin, contre l’actualité artistique qui chasse ce que l’on se croyait capable de retenir, les catalogues d’expositions peuvent avoir, quand ils sont faits avec exigence, un rôle certain à jouer.
Nous établissons notre sélection, avec Paris 2014 : LES MEILLEURS CATALOGUES d’expositions de Paris.
Nous vous proposons aussi une sélection d’expositions et de festivals dans les villes françaises suivantes :
– Angoulême - Arles - Avignon - Bordeaux - Dijon - Grenoble - Ile-de-France - Lens - Lille - Lyon - Marseille - Metz - Montpellier - Nantes - Nice - Ornans - Rennes - Rodez - Rouen, Le Havre - Saint-Étienne - Strasbourg - Toulouse - Tours
Et bien sûr pour Paris :
– Les Grandes Expositions 2015 à Paris de A à Z
– Calendrier 2015 des grandes expositions à Paris
peuvent déjà être consultés sur Évous.fr... et complétés, si vous disposez de plus d’informations que nous !
Et juste quelques expositions 2014 pour Bruxelles et Londres, Genève, Bâle, Amsterdam...
André Balbo
sources : Visite, Mémorial de la Shoah