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Interview : William Baldé prêt à rayonner

jeudi 28 avril 2011, par Jean

Vendredi après-midi, quelque part dans le deuxième arrondissement de Paris. J’arrive au rendez-vous avec dix minutes de retard. Heureusement, William Baldé, qui enchaine les interviews, ne semble pas être plus ponctuel que moi... Soudain, c’est mon tour.
J’entre dans une pièce et m’assois, armé de mes questions et mon enregistreur. C’est parti pour 20 minutes de discussion avec un artiste rayonnant, à qui tout semble sourire.

Bonjour William ! Avant de venir en France, tu as passé une partie de ton enfance à Dakar. Quel souvenir en as-tu gardé ?
Le souvenir que je garde de Dakar ? Un joyeux bordel ! (rires) J’y ai vécu 4 ans. Avant ça, j’étais en Guinée, un pays encore plus contrasté parce que c’est une dictature. Lorsque je suis arrivé à Dakar, j’ai eu l’impression d’être au paradis ! Mais j’aime ce côté bordélique de l’Afrique que je retrouve aussi en Inde… c’est peut-être pour ça que j’aime autant y aller !

Quelles ont été tes impressions à ton arrivée à Paris, à 15 ans ?
J’étais déjà venu en vacances quand j’avais 9 ans mais comme je suis tombé malade, j’ai été renvoyé chez moi. Quand je suis arrivé, je n’ai pas été très impressionné. Mon père m’a emmené en voiture sur les Champs Elysées et je me suis dit "C’est un gâchis, ils ont de grandes avenues et ils ne font même pas la fête dedans !!"

Tu voulais être avocat lorsque tu étais ado. Qu’est-ce qui t’a fait changer d’avis ?
J’ai rencontré pas mal de gens qui avaient l’air de s’amuser en jouant de la musique dans le métro. Je me suis dit "C’est cool : tu chantes, tu passes le chapeau et les gens te donnent des sous !". Je ne me suis même pas rendu compte que je commençais à trainer avec ces gens-là, à aller de moins en moins en cours et à commencer à vivre comme eux.
Ca a un lien avec la Guinée. Ma mère était médecin et beaucoup d’artistes passaient à la maison. C’est aussi pour ça que je me suis retrouvé à parler avec ces gens-là, à trainer avec eux.

Ce n’était pas trop la galère ?
Depuis le moment où j’ai commencé la musique, je n’ai pas galéré. Au début quand je jouais dans le métro, je ne gagnais pas des mille et des cents mais assez vite, je me suis rendu compte que je pouvais gagner entre 300 et 400 francs en jouant dans quelques wagons. Après, il suffisait juste de s’organiser, et être à deux ou trois. C’est très mathématique : il fallait que deux continuent à faire de la musique pendant que le troisième passait dans le wagon avec le chapeau ! (rires)
On s’attaquait à de vraies références, à des chansons d’Otis Redding comme Try a Little Tenderness. Aujourd’hui, je me demande encore comment on a osé le chanter dans le métro. C’était un vrai challenge ! Et c’est ça qui me manque aujourd’hui. C’est facile d’arriver sur une scène où ton pied de micro est déjà réglé et les gens vont applaudir même si tu te plantes… Alors que dans un wagon, les gens ne t’attendent pas.

Et ensuite, tu es parti à Nice…
Oui et ça n’a pas marché du tout. On a alors eu la bonne idée d’essayer à Saint-Tropez. On est arrivé là-bas et du jour au lendemain, les gens nous ont ouvert leurs portes. Ils étaient impressionnés de nous voir tout faire en acoustique, il ne nous fallait aucun micro ni aucun ampli. En plus, on reprenait des chansons de Stevie Wonder, de Marvin Gaye… Que des choses qu’ils connaissaient bien.

C’est à ce moment que ton chemin a croisé celui de Christophe Maé ?
On jouait dans un endroit qui s’appelait la Bodega. Un jour, on finit une balance et je vois un gars qui arrive avec sa guitare. Il me demande s’il peut jouer avec nous et je lui réponds non, parce qu’on est déjà un groupe structuré mais que s’il veut, il peut jouer avant nous.
Quand je suis revenu, je l’ai entendu jouer et j’ai vu l’impact qu’il avait… C’est comme ça que j’ai rencontré Christophe Maé, il y a dix ans ! J’étais impressionné. Je le trouvais habité quand il chantait. Il reprenait des titres de Tracy Chapman ou Stevie Wonder (souvent dans un anglais très approximatif !) mais je me suis tout de suite retrouvé en lui. Je me suis dit qu’il était comme nous.

Et dix ans plus tard, il t’a rendu la pareille ?
C’est plus compliqué que ça, en fait. Le président de Warner qui l’a signé me connaissait déjà mais ne savait pas que l’on se fréquentait. Alors quand il m’a proposé de faire sa première partie, je lui ai dit que je le connaissais. Nos destins n’arrêtent pas de se croiser.

Ca fait quoi de chanter dans des Zéniths, en première partie de Christophe ?
C’est incroyable ! …mais pas plus impressionnant que de chanter dans le métro (rires) ! Et c’est vrai ! C’est dix fois plus impressionnant de monter dans un wagon et de dire "Mesdames et messieurs, bonjour". A peine t’as terminé ta phrase, tu te demandes ce que tu vas faire ensuite !

Comment te sens-tu à quelques jours de la sortie de ton premier album ?
Je suis assez serein en fait. J’ai déjà été très impressionné d’entendre ma chanson Rayon de soleil sur une radio comme NRJ !

As-tu composé l’album ?
Oui. En général, je suis auteur-compositeur, même si parfois je suis inspiré par des textes écrits par des amis. Ca s’est passé "à la bonne franquette" !
J’y parle beaucoup d’exil et de voyage, parce que c’est ma passion. J’aime aussi parler de l’idée que nous ne sommes pas forcément ce que l’on parait. Par exemple, j’ai des locks mais je ne fume même pas de cigarettes ! Je suis français mais en même temps touareg, peul, éthiopien par ma mère… C’est pour ça que l’album s’appelle En corps étranger.

Ton single Rayon de soleil est très léger par rapport aux autres titres de l’album. As-tu peur d’être catalogué "artiste de l’été" ?
Honnêtement, non. Par contre, j’ai peur que les gens se trompent de propos. J’ai peur que certains pensent que tout l’album est comme Rayon de soleil alors que ce n’est pas le cas. Mais je pense qu’ils comprendront que William Baldé, ce n’est pas seulement le mec qu’on voit déambuler dans la rue, comme dans le clip !

Quels sont tes titres préférés sur ton disque ?
J’en ai eu deux. Le premier est une chanson en wolof, Yonn-Gui, qui veut dire "Ce destin". Le second est Sur la route de Dakar. Ce sont mes morceaux préférés car je pense que ce sont ceux qui me résument le mieux, qui représentent ce que je suis.

Tu repars bientôt en tournée avec Christophe Maé...
C’est super agréable de faire la première partie de Christophe. Il m’annonce comme étant un vieil ami à lui, les gens sentent qu’on a une histoire commune. J’ai beaucoup de respect pour lui. D’ailleurs, certains propos sur lui m’énervent. Certains disent que ce n’est pas un vrai artiste. Le gars a quitté la boulangerie-pâtisserie paternelle avec sa guitare pour aller sur les routes : c’est pas un vrai artiste, ça ??

Quand tu reprendras la route, ton album sera sorti et les gens connaitront tes chansons…
Oui, c’est le cheminement logique. Maintenant il faut aller défendre mon album ! Mais je ne suis pas retourné sur scène depuis que le single passe en radio ! Je sens que je vais être ému…


William Baldé, En corps étranger (Warner Music France)
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