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DERNIERS JOURS de l’exposition Carambolage, où les rencontres de 180 œuvres...

Du 2 mars au 4 juillet 2016, une traversée de l’art originale et inédite au Grand Palais.


Pour une fois, je commencerai par présenter le commissaire de l’exposition, Jean-Hubert Martin. Cet homme commit beaucoup dans les musées, dont de très grandes expositions restées dans les mémoires, mais peut-être l’une d’elles dépassait-elle les autres, "Magiciens de la Terre", tenue en 1989 à la fois au Centre Georges Pompidou et à la Grande Halle de la Villette.

Cette exposition prenait au collet l’Occident et lui faisait reconnaître, qu’au-delà de l’Europe et des États-Unis, d’autres contrées recelaient peut-être également des artistes aux talents inouïs (ne cherchez pas, il n’y a aucune intention de jeu de mots).

Pour ménager les ethnocentristes incurables que nous sommes si volontiers et de façon si confortable, le terme de magicien était alors employé en lieu et place d’artiste, mais cela permettait la mise au jour pour nous Occidentaux, sans que nous ne soyons trop froissés, de vrais talents comme le Chinois Huang Yong Ping, en charge du Monumenta 2016, de l’Ivoirien Frédéric Bruly Bouabré, dessinateur et poète, et du sculpteur congolais Bodys Isek Kingelez.

Jean-Auguste-Dominique Ingres, Léda et le cygne, mine de plomb sur papier (Montauban, musée Ingres)

Depuis cette date, Jean-Hubert Martin s’attachait fréquemment à élargir la brèche ainsi ouverte...

Aujourd’hui, il frappe un autre coup avec l’exposition Carambolage. Peut-on parvenir à décloisonner l’approche si traditionnelle que nous nous faisons de l’art ? Sans les oublier, peut-on outrepasser les frontières des genres (peintures, sculptures, vidéos, installations, objets cultuels, artefacts), des époques, des continents et des cultures ? Peut-on, sans risque de confusion, parler d’imaginaire collectif, voire à l’imaginaire collectif ?

N’établit-on pas ainsi tout bonnement le long cheminement d’un cabinet de curiosités à étapes intermédiaires, un andré-breton modélisé et industrialisé ?

Clovis Trouille. Bikini, 1946. Huile sur toile ; 33 x 46 cm ; collection particulière.

Cette exposition aura-t-elle la capacité d’offrir une traversée de l’art, qui serait universel, à partir d’un point de vue délibérément actuel, ou peut-être sensuel, ou barbare ?

Ouvrant le champ à la fabrication d’un cabinet de curiosités multi-culturel et de tous les âges de l’Homme.

Ainsi l’exercice se limite-t-il à tout de même plus de 180 œuvres, regroupées au fil et au gré de leurs affinités formelles ou mentales. Ces créations ou objets présentés, souvent atypiques, ont été choisis pour le fort impact visuel qu’ils produisent sur nous. S’ils correspondent à des interrogations ou à des choix contemporains, il ne serait ici tenu aucun compte de leur contexte d’origine.

Ces œuvres sont ordonnées selon une séquence continue, quasi narrative, dans laquelle chacune, selon le commissaire, dépend de la précédente et annonce la suivante, tel un collier de perles.

Hippolyte Rigaud, Etude de mains (détail), Montpellier, Musée Fabre © Musée Fabre de Montpellier Méditerranée Métropole - photographie Frédéric Jaulmes

Dans ce continuum artistique forcément éminemment subjectif, place est tout de même laissée à la pensée visuelle, aux rebonds des imaginaires, à une pédagogie du sensible, et tout de même aux surprises de l’art.

Bien entendu, nous sommes au Grand Palais, et le visiteur déambule parmi les œuvres d’artistes, pour la plupart, imposants et reconnus, dont Boucher, Giacometti, Rembrandt, Man Ray ou même Annette Messager.

Les artistes, dans leur vie et leur pratique, se constituent et accumulent une masse de références visuelles puisées dans l’histoire de l’art. Elles sont une partie de leurs bagages. Leur choix personnel et libre ne s’encombre que rarement d’un ordonnancement qui leur serait prévalant, ou trop respectueux de logiques comme des catégories de la connaissance.

À croire que la question d’un nouvel ordre à trouver, qui ne serait plus uniquement celui de l’histoire de l’art et de son inévitable chronologie, préoccupe de plus en plus certains conservateurs, condamnés si souvent à présenter un corpus d’œuvres, qui n’est pas infini, dans des contextes qu’ils se doivent de perpétuellement réinventer.

Le courant de l’histoire de l’art, incarné par l’Allemand compilateur Aby Warburg (1866-1929), l’historien de l’imagerie du XXe siècle Ernst Gombrich (1909-2001), et le médiéviste Jurgis Baltrusaïtis (1903-1988), trouve aujourd’hui un regain d’intérêt et stimule des études et des expositions. La conception transculturelle qu’ils ont de l’art, leur approche large ne s’arrêtant pas à l’art savant et leur usage du comparatisme servent de fondement à la réflexion pour ce projet.

Cette conception décloisonnée de l’assemblage des œuvres, obéissant à des critères non exclusivement historiques, se retrouve très fréquemment dans les collections privées d’hier et d’aujourd’hui.

Le musée y a opposé son ordre rationnel, sauf dans quelques cas où des donateurs ont exigé que leur présentation soit intégralement préservée, par exemple le Soane Museum à Londres, le Pitt Rivers Museum à Oxford, ou encore le Gardner Museum à Boston. Ces musées connaissent un regain d’intérêt aussi bien auprès du public que des experts, sous le charme des surprises que réserve leur présentation à base d’affinités formelles ou mentales.

Le dernier mot de ces contorsions ou fulgurances spectaculaires demeurera au public et au nombre d’entrées obtenues par l’exposition. Ils signifieront le talent et la pédagogie qui auront été apportés à un tel concept. Réponse attendue assez difficilement prévisible.

Personnellement, et malgré le respect que j’ai pour l’intention d’un tel projet, j’ai été un peu contrarié au cours de la visite par l’absence de cartels explicatifs et individuels œuvre par œuvre qui sont pour moi des accompagnements à la rencontre sensorielle. Devoir systématiquement se reporter à la marge des travées pour y voir défiler un rapide diaporama, succinct pour chaque artefact, mais forçant notre attention sur les associations faites entre objets et œuvres m’a réellement agacé.

Quand les relations et familiarités existent, elles sont soit assénées de façon docte, et la répétition de l’accrochage et des insuffisants cartels diaporamisés martèlent ces liaisons, soit ressenties subjectivement et, personnelles, appartiennent alors à chaque visiteur.

Gilles Barbier. Anatomie trans-schizophrène, 1999, cire ; 32 x 33,5 x 25 cm. Paris courtoisie galerie G.-P. et N. Vallois.

Cela étant la promenade est formidable... avec des dessins d’Ingres (le puissant Léda et le Cygne, et le hollandisé Les Trois Femmes au bain), le rapprochement de peintures de Churchill et d’Hitler, ou le Monument à D. A. F. de Sade, de Man Ray, qui appartenait à Breton.

Comme il fallait s’y attendre, les crânes pleuvent comme à Gravelines. Ils sont légions et de toutes matières, dominés par la tapisserie des Gants-tête, d’Annette Messager, celui décoré des Îles Salomon, le très curieux Anatomie trans-schizophrène, de Gilles Barbier, et le demi-crâne décoré et gravé de Bornéo. Réjouissant paysage, semé pourtant d’inquiétudes, dans le tableau Bikini, de Clovis Trouille, et formidable Étui pour une mobylette, avec mobylette (!), de Wim Delvoye.

Wim Delvoye. Étui pour une mobylette, 2004, aluminium, laque, flock, Peugeot Vogue ; 70 x 175 x 115 cm ; collection particulière Paris, courtoisie galerie Perrotin.

D’autres œuvres laissent peut-être un lourd parfum de déjà vu comme Le Temps coupant les ailes de l’Amour, de Mignard, Le Chat de Giacometti, décidément souvent en promenade, les pisseurs de Rembrandt, ce qui n’enlève bien sûr rien à son talent, ou La Jupe relevée, et très aérienne, de François Boucher.

Carambolages, du 2 mars au 4 juillet 2016, au Grand Palais, Galeries nationales, entrée Clemenceau, avenue du Général Eisenhower, 75008 Paris. Métro Franklin-D.-Roosevelt, ou Champs-Elysées-Clemenceau. Dimanche et lundi de 10 à 20h. Mercredi, jeudi, vendredi, samedi de 10 à 22h. Mardi : visites groupées et privatisations possibles sur inscriptions. 13 ou 9€. Gratuité selon conditions habituelles du Grand Palais. Prévente sur www.grandpalais.fr. Visites guidées prévues pour les individuels et les groupes (informations disponibles sur le site du Grand Palais).

Lire aussi : Toutes les expositions 2016 au Grand Palais.


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Vous retrouvez comme chaque année dans LES GRANDES EXPOSITIONS 2016 à Paris de A à Z les différentes expositions annoncées par leurs établissements et musées.

Frederic Leighton (1830–1896) Crenaia, the nymph of the dargle, ca. 1880 Huile sur toile 76.2x26.7 cm Colección Pérez Simón, Mexico © Arturo Piera, Musée Jacquemart-André 09/13-01/14

Dans CALENDRIER 2016 des grandes expositions à Paris ces mêmes expositions sont classées par dates.

Dans la série Toutes les expositions 2016 dans les plus grands musées de Paris... lire également :
Au musée du Louvre, au Centre Pompidou, au Grand Palais, au musée d’Orsay, au musée d’Art moderne de la Ville de Paris, au Jeu de Paume, au Palais de Tokyo, à la Bibliothèque nationale de France, au musée du Quai Branly, au musée des Arts décoratifs, à la Fondation Cartier pour l’art contemporain, au musée Guimet, au musée Galliera, et au Petit Palais.

Nous nous efforçons de tenir ces articles à jour, et nous vous remercions des suggestions, précisions, ajouts et corrections que vous pourriez être amenés à apporter à ces programmes.

Nous vous indiquons chaque semaine les nouveautés, les expositions qui fermeront bientôt leurs portes, et... nos préférences, car on ne se refait pas : LA SEMAINE des expositions, musées, et galeries : que faire à Paris du....

Contre l’actualité artistique qui chasse ce que l’on se croyait capable de retenir, les catalogues d’expositions peuvent avoir, quand ils sont faits avec exigence, un rôle certain à jouer. Nous établissons, au fur et à mesure de leur publication, notre sélection des catalogues d’expositions 2016 de Paris, comme nous l’avons fait les années précédentes : 2015, 2014, 2013, 2012.

Vous pouvez consulter une centaine de présentations d’artistes, classées de A à Z.

Nous vous proposons aussi une sélection de musées et d’expositions dans les villes françaises suivantes, que nous nous efforçons de tenir assez régulièrement à jour :
Angoulême - Arles - Avignon - Bordeaux - Dijon - Grenoble - Ile-de-France - Lens - Lille - Lyon - Marseille - Metz - Montpellier - Nantes - Nice - Ornans - Rennes - Rodez - Rouen, Le Havre - Saint-Étienne - Strasbourg - Toulouse - Tours

Et juste des musées et expositions temporaires pour quelques villes étrangères : Amsterdam, Berlin, Bâle, Bruxelles, Genève, Londres, Madrid, Milan, et Venise.

André Balbo

sources : Visite, Jean-Hubert Martin, Rmn-GP

Informations pratiques
Adresse, horaires, numéro de téléphone, liens...

samedi 26 novembre 2016,    Expositions