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PARIS 2012 : les meilleurs catalogues d’expositions de Paris, dont les 10 nominés, les 2 Mentions spéciales et le Prix CatalPa 2012 !


Vous retrouvez dans l’article « 2012 à Paris : les grandes expositions de A à Z » les différentes expositions 2012 annoncées par leurs établissements et musées, et dans l’article « Calendrier 2012 des grandes expositions à Paris », ces mêmes événements classés par dates. En général, dès leur inauguration, nous les visitons.

Mais que reste-t-il de nos amours ? De nos émotions artistiques ? De nos découvertes plastiques, culturelles, historiques qui effleurèrent nos sens et nos pensées ?

Qui parvient toujours à faire tout ce qu’il veut ? À satisfaire toutes ses envies, toutes ses curiosités ? À visiter, pour ne prendre que cet exemple, l’ensemble des expositions qui l’auraient intéressé ? À retenir, à la fois dans sa mémoire et sa sensibilité profonde, chacune des œuvres d’art, des découvertes scientifiques, révélations archéologiques ou historiques, qui aura su le toucher, en un lieu, un instant, quelques jours ?

Les musées organisent pour nous (comme pour eux !), et par missions, des événements dits "culturels" de toutes natures. Ils brassent des concepts, organisent des focus chronologiques, des rencontres artistiques, des associations d’idées ou d’artistes, voire des confrontations, judicieuses ou moins. Parfois, l’idée d’une exposition est originale, et peut même être forte. Inédite. Révéler un artiste dont l’œuvre parviendra à nous toucher intimement. Rassembler très largement une partie conséquente de son œuvre. La présenter de telle manière que soudain une compréhension nouvelle nous atteint et complète notre vision.

Plongée dans les catalogues d’expositions de la cuvée 2012. Photo Jean-Gabriel Lopez, DR

Dans notre lutte permanente contre le temps qui file, là comme ailleurs, contre l’actualité artistique ou culturelle qui chasse ce que l’on se croyait capable de retenir, les catalogues d’expositions peuvent avoir, quand ils sont faits avec exigence, un rôle certain à jouer.

Ils peuvent même, à partir du rassemblement momentané d’œuvres d’origines multiples, offrir de véritables prolongements à ces ravissements exceptionnels qui auraient pu, sans ces publications, n’être que fugaces.

Pour leurs diverses qualités, et dans leurs différentes fonctions, nous sélectionnons les meilleurs catalogues des expositions parisiennes. Ces ouvrages peuvent nous aider. Ils sont susceptibles plus durablement de nous laisser les traces de ces événements artistiques ou culturels qui font de Paris une ville particulièrement attrayante en ces domaines. Ils sont parfois aussi capables de nous offrir des approfondissements, des présentations encore plus complètes, et des "compléments d’enquêtes".

Il s’agit, là encore, certainement d’un choix involontairement partisan. Et certainement de graves oublis demeurent dans cette sélection. Merci de nous les indiquer, quand ils vous paraissent impardonnables, en nous précisant les raisons de vos choix. Nous les entendrons.

CHACUN DE CES CATALOGUES EST MIS EN LIEN AVEC L’ARTICLE PRÉSENTANT L’EXPOSITION... QUI LUI A DONNÉ LE JOUR.

De plus, nous vous avions indiqué en avant-première les 10 nominés 2012 au Prix CatalPa pour les catalogues d’expositions de Paris, sélectionnés parmi les 69 catalogues de l’année retenus pour cette compétition.

Le jury de l’Affaire des catalogues, dont j’ai l’honneur de faire partie, a décerné le Prix CatalPa 2012 le 11 décembre 2012, dans la grande salle de la brasserie Le Progrès, rue de Bretagne, et félicité les 3 coéditeurs du catalogue lauréat Les Enfants du paradis : la Cinémathèque française, la Fondation Jérôme Seydoux et les éditions Xavier Barral.

Deux Mentions spéciales ont été attribuées à Artemisia, édité par le musée Maillol et les éditions Gallimard, et à Wim Delvoye : au Louvre, édité par le Fonds Mercator et le musée du Louvre.

Mais comme le temps passe inexorablement... il est plus que temps de vous reportez dès maintenant aux articles qui parlent de l’avenir :
2013 à Paris : les grandes expositions de A à Z ;
CALENDRIER 2013 des grandes expositions à Paris ;
PARIS 2013 : les meilleurs catalogues d’expositions de Paris.

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Abbott (Berenice)

Ce catalogue a accompagné une rétrospective sur Abbott, tenue au Jeu de Paume.

Berenice Abbott fut essentiellement connue pour le travail qu’elle effectua dans l’immédiate "après crise" des Années 1930, observant au bout de son objectif la violence des changements urbanistiques et architecturaux auxquels New York était confrontée. Cette œuvre fut publiée sous le titre de "Changing New York".

Quand elle arriva jeune femme à Paris, elle collabora un temps avec Man Ray (fut même son modèle !), qui lui enseigna ses secrets de tirage et du travail en studio, mais elle prit rapidement son envol à Paris comme portraitiste, notamment d’artistes (Jean Cocteau, André Salmon, James Joyce, Marie Laurencin, Foujita, André Gide, et bien d’autres).

De retour aux États-Unis, Berenice Abbott fit des photos d’architecture et de design, et même, ce qui est moins connu, des clichés expérimentaux et scientifiques (mouvements, électromagnétisme, etc).

Elle attacha aussi une grande place à ce que le photographe Eugène Atget soit reconnu comme l’un des tout premiers maîtres de la photographie.

Un livre de référence.

Berenice Abbott. Éditions Hazan. 224 pages. N & B. 35€.

Aborigène (Aux sources de la peinture)

Ce prodigieux catalogue, traduit d’un ouvrage de la National Gallery of Victoria, part à la recherche des origines d’un mouvement artistique majeur né à Papunya, que l’on pourrait qualifier d’équivalent australien du cubisme européen ou de l’expressionnisme abstrait américain.

Dans ce territoire gouvernemental des les grands déserts d’Australie centrale, un groupe d’initiés aborigènes commença à transposer sur des tableaux les peintures rituelles jusque-là éphémères.

En 1971, Geoffrey Bardon, jeune professeur de dessin arrivant à Papunya, eut l’idée de faire venir à l’école des Anciens, afin de renouer le lien des jeunes générations avec leur propre culture, les encourageant à peindre sur les murs de l’école. Ce qui fut initié ainsi ne sera que le germe d’un mouvement, puisque, avec ces artistes, allait être fondée une première coopérative établissant des relations avec des galeries d’Alice Springs.

Ni repris, ni adapté d’une quelconque autre tradition artistique, l’Art du désert Occidental relève du domaine de l’art contemporain, puisant sa force du choc de l’ancien devenu nouveau. Peintes sur des morceaux de panneaux recyclés, les premières peintures surprennent par leur intensité brute, la plénitude du geste et leur énergie visuelle.

Confrontés à des matériaux nouveaux pour eux, comme les crayons, pinceaux, peintures émaillées et acryliques, ces artistes transposèrent leurs dessins archétypaux sur les rectangles et carrés à bords irréguliers de la toile. Leurs premiers tableaux, investis d’un pouvoir rituel et solennel, rendirent immédiatement palpable et permanent un art éphémère autrefois lié aux sites cérémoniels.

Entre 160 et 200 toiles d’une vingtaine d’artistes fondateurs du mouvement sont présentées dans l’exposition en regard d’une centaine d’objets où apparaissent des motifs traditionnels aborigènes.

Aux sources de la peinture aborigène, musée du quai Branly / Somogy, 336 pages, 228 illustrations, 45€.

Algériens en France. 1954-1962 : la guerre, l’exil, la vie

Ce catalogue, illustré de nombreux documents d’archives, photographies, peintures, objets personnels, lettres et dessins, a été dirigé par les historiens Benjamin Stora et Linda Amiri.

Il dévoile un pan jusque-là méconnu de la Guerre d’Algérie : ce que fut la vie quotidienne de l’immigration algérienne en France.

Entre 1954 et 1962, et alors même que la France et l’Algérie s’affrontent dans une guerre sanglante et sans merci, l’immigration algérienne bizarrement double en Métropole.

Dans l’exploration qu’ils ont fait de cette période si troublée, les historiens se sont appuyés aussi bien sur les témoignages de combattants et de militants que sur des gens ordinaires, simples travailleurs immigrés.

Ce livre offre d’émouvantes traversées, de Marseille à Longwy, du bidonville de La Folie à Nanterre aux cafés lyonnais, parmi ces populations. Vous ferez une plongée dans la vie quotidienne de ces femmes et hommes, souvent "invisibles", et dont l’histoire est aussi la nôtre.

Cet ouvrage a été désigné par le jury de l’Affaire des catalogues comme l’un des 10 nominés 2012 au Prix CatalPa pour les catalogues d’expositions de Paris.

Algériens en France. 1954-1962 : la guerre, l’exil, la vie. Catalogue de l’exposition. Cité nationale de l’histoire de l’immigration / Éditions Autrement, 224 pages, 30€.

Art naïf : Histoires de voir, Show and Tell

Ambitieuse tentative de la Fondation Cartier pour l’art contemporain que de tenter d’amorcer une réévaluation de l’art dit « naïf ». Dans ce somptueux catalogue, en prolongement de l’exposition, 30 récits d’artistes, qui, chacun à sa manière, quelles que soient son histoire, ses difficultés ou fêlures personnelles, est parvenu à lancer sa forme d’art au visage du monde et à communiquer avec les autres hommes d’une façon originale et intense.

Ces histoires sont racontées par l’artiste lui-même, comme c’est le cas pour le Mexicain Gregorio Barrio, ou les Japonais Takeshi Kitano et Tadanori Yokoo par exemple, ou par un auteur spécialiste, qui s’en fait l’intercesseur, le traducteur et donc le menteur, comme disait la mère de Napoléon.

Les interrogations de Gauguin demeurent : D’où venons-nous ? Que sommes-nous ? Où allons-nous ? Plus de 300 images des sculptures, peintures et dessins exposés, et une occasion unique de mieux connaître les incroyables contextes dans lesquels travaillent ces artistes qui viennent d’Amérique latine, d’Afrique, d’Asie et même d’Europe. Bruce Albert, Laymert Garcia dos Santos et Sally Price apportent à cet ouvrage leur œil de spécialistes, et parfois un regard critique sur l’exposition.

Ce bel objet, à la couverture toilée et précieuse, mêle les œuvres aux portraits respectueux de leurs créateurs. 240 pages, 26,5x31,5cm, 47€. Fondation Cartier pour l’art contemporain.

Artemisia

Un prestigieux catalogue sur l’exposition : Artemisia (1593-1654). Pouvoir, gloire et passions d’une femme peintre, par Alexandra Lapierre, a été publié, en coédition par le musée Maillol - Fondation Dina Vierny et Gallimard. 245x285mm, 256p., 120 illustrations d’excellente qualité, 39€.

Il existe aussi un hors-série Découvertes.

Cet ouvrage, désigné dans un premier temps par le jury de l’Affaire des catalogues comme l’un des 10 nominés 2012 au Prix CatalPa, s’est vu décerné une Mention spéciale au Prix CatalPa 2012 pour les catalogues d’expositions de Paris.

Giovanna Citi-Hebey, des éditions Gallimard, recevant les félicitations, au nom des Arpenteurs d’expositions, de Christian Fabre et André Balbo pour la Mention spéciale obtenue au Prix CatalPa. Photo Marius Péan de Ponfilly, DR.

"En quête de sa propre gloire et de sa liberté, Artemisia a travaillé pour des princes et des cardinaux, et, inlassablement, a construit son œuvre."

La biographie, des textes riches, des tableaux que l’on n’est pas prêt de revoir, et encore moins ensemble...

Les plus grands spécialistes ont participé à la rédaction de cet ouvrage : Roberto Contini, co-commissaire de l’exposition, avec Francesco Solinas, et tous les autres.

Un ouvrage à ne pas laisser passer... Un seul regret, l’incroyable David sur lapis-lazuli, d’Orazio, que nous représentons dans l’article, ne figure pas dans l’ouvrage, ayant été découvert trop tardivement et la fabrication du livre étant trop avancée.

Deux autres ouvrages, pour mieux comprendre l’époque, les épreuves, et peut-être aussi la sensibilité particulière d’Artemesia, au cœur, au-delà, ou à côté du drame qui la toucha, sa sensibilité d’artiste vouée corps et âme à son art, et cela en tous instants :

Catherine Weinzaepflen, Orpiment, aux Éditions des femmes (illustration), une réussite dans l’approche, de fines hypothèses de compréhension.

Artemisia Gentileschi, Actes d’un procès pour viol en 1612, aussi aux Éditions des femmes (illustration), méticuleux, cruel, et si actuel.

Le film "Artemisia" d’Agnès Merlet, s’inspirant, assez librement dit-on, de sa vie, ressortit quelques temps en salles à l’occasion de cette exposition, et le DVD vient d’être réédité. Avec Valentina Cervi, Emmanuelle Devos et Michel Serrault.

Atget (Eugène). Paris

Ce sera avec passion et systématisme que cet autodidacte de la photographie se lancera de son propre chef dans une vaste monographie méthodique des authenticités d’un Paris magique tournant déjà le dos, du fait du baron Haussmann, à certaines facettes de son passé. Encouragé par les clientèles de prestigieuses institutions comme la Bibliothèque nationale, le musée Carnavalet, ou par celle de jeunes talents appelés à devenir célèbre comme son voisin Man Ray, ou d’autres artistes, des peintres, des illustrateurs, Eugène Atget (1857-1927) allait rapidement prendre une place éminente au panthéon des maîtres de la photographie.

Il créait le style documentaire dont les successeurs se révèleraient nombreux : Man Ray, Berenice Abbott, Walker Evans, Doisneau, et même Ai Wei Wei.

L’exposition, trop brève, comme le catalogue montrent des images toutes au même format, d’une pureté toute classique et aux multiples et douces nuances. Chez Atget, un simple pavé parisien vous fait croire à une photo en couleurs.

Cet ouvrage a été désigné par le jury de l’Affaire des catalogues comme l’un des 10 nominés 2012 au Prix CatalPa pour les catalogues d’expositions de Paris.

Eugène Atget. Paris. Chez Gallimard, 348 pages, 24x31cm, 45€. Ce livre deviendra bien vite un des grands classiques des ouvrages de photographie.

Beauté animale

Ce beau livre suit l’exposition pas à pas, avec méthode et de brillants auteurs dont Claude Blanckaert, Emmanuelle Héran, Esther Laroche, et Madeleine Pinault Sørensen. Sur ce vaste thème artistique qu’a toujours été l’animal, les différentes phases traversées sont décryptées avec soin, esprit et rigueur : Observations, Préjugés, puis Découvertes.

Si les explications apportées sur nos regards à l’animal à travers l’histoire artistique sont exceptionnellement intéressantes et pertinentes, le même reproche que celui fait à l’exposition elle-même demeure justifié : tant de talents n’auraient-ils pas brillé encore davantage en globalisant l’approche à d’autres civilisations que la nôtre, et en n’omettant pas nos grands artistes des cavernes ?

Un catalogue, dans cette seule limite, fort bien fait, avec tous les outils de lecture nécessaires auxquels les éditeurs de livres d’art ne pensent pas toujours, index, bibliographie sélective, toutes les précisions sur les œuvres exposées, des reproductions de qualité, 240p, Rmn-GP, 39€. Un superbe cadeau.

Prêtez attention au Chat, de Giacometti, au terrible Combat de chats, de Goya, à l’incroyable Chat blanc de Bonnard, au Chat sur un fauteuil, si vivant, d’Alexandre Steinlen, aux quelques splendides sculptures de Rembrandt Bugatti, au style si identifiable, dont les Deux Alpagas, à la surprenante Chauve-souris, de van Gogh, au Vol du goéland, commandé par Jules Marey, et aux quelques dodos, cachés dans les coins de certains tableaux, pour ceux qui sauront les retrouver dans les foules, comme Charlie. Quant à la litho de Manet Le Rendez-vous des chats… il y aurait tant à dire !

Un catalogue fort bien fait, avec tous les outils de lecture nécessaires auxquels les éditeurs de livres d’art ne pensent pas toujours, index, bibliographie sélective, toutes les précisions sur les œuvres exposées, des reproductions de qualité, 240p, 39€, RMN-GP.

Buren (Daniel)

Daniel Buren, certainement l’artiste français le plus connu au monde, fut l’invité 2012 au Grand Palais de la manifestation ’Monumenta’. À cette occasion, la fameuse monographie de référence de Guy Lelong (2001) a été augmentée de 40 pages, et republiée, permettant l’ajout des œuvres les plus récentes de l’artiste : Centre Pompidou (2002), Musée Guggenheim de New York (2005), château de Tours (2005), musée Picasso (2008), Monumenta 2012, avec les jeux visuels que ces grands dispositifs proposent. Le travail de Daniel Buren évolue vers une dimension de plus en plus architecturale, si ce n’est monumentale. Son pavillon a flotté sur le Grand Palais, avec ses bandes de 8,7cm de large. 240 pages, 24x28cm, 46€, Flammarion.

Il existe aussi un délicat petit catalogue Daniel Buren Monumenta 2012 Excentrique(s) Travail in situ Grand Palais, français-anglais, avec les textes de Daniel Buren, Marc Sanchez et Jean-Marie Gallais, qui permet de s’imprégner parfaitement bien de quelques-uns de ses concepts-clés. Les croquis de préparation et les photos de l’événement sont fantastiques.

Rappelons que l’édition 2012 arriva, avec Daniel Buren, 2e en terme de fréquentation sur les 5 expositions "Monumenta" qui furent organisées.

80 pages, 12,90€, CNAP/RMN-GP.

Daniel Buren a également tenu à ce que soit publié le cheminement graphique de son travail, qu’il a intitulé "Esquisses graphiques, Excentrique(s), Monumenta 2012.

Peu de mots, ou jetés à même l’esquisse, puisque : " Les dessins que je fais sont là pour essayer de comprendre ce que mon imagination voudrait. J’ai écrit il y a longtemps un texte sur ce que j’entends par "dessin" et pourquoi je n’emploie pas ce terme lorsque je "dessine" sur une feuille de papier. Pour moi le dessin se trouve directement dans mes œuvres, in situ, ce sont les découpes qui se forment dans l’espace, les murs qui sont construits et qui forment des lignes courbes, droites, brisées... Tout ce qui m’aide à préciser certaines pensées constitue en revanche des "esquisses graphiques". En font partie mes textes écrits à la main."

Suivre ainsi pas à pas la conception jusqu’aux choix définitifs.

Daniel Buren. Excentriques(s), Monumenta 2012. Esquisses graphiques. Éditions Dilecta. 112 pages. 28€.

Burton (Tim)

En coédition avec le MoMA, qui fut à l’origine de cette exposition sur Tim Burton, cet étrange réalisateur qui réinvente le cinéma de genre hollywoodien en mélangeant le fantastique, l’horreur et la comédie, la Cinémathèque française a publié cet album, à la fois modeste et ambitieux, sous la direction éditoriale de Ron Magliozzi et de Jenny He, conservateurs au département cinéma du MoMA de New York.

Un univers visuel à l’extrême, survolé avec un grande maîtrise.

Nous n’avons pu juger de l’intérêt du catalogue proprement dit.

Tim Burton. Préface de Serge Toubiana. 64 pages, 64 illustrations couleur, 14,90€. Disponible également en anglais 17,90€.

Canaletto : Canaletto à Venise

Giovanni Antonio Canal, appelé Canaletto (1697-1768), fut de son vivant le plus célèbre des vedutisti vénitiens du XVIIIe siècle, et ses œuvres continuent d’être aujourd’hui prisées et activement recherchées par de nombreux collectionneurs du monde entier.

Le marchand et collectionneur anglais Joseph Smith lui facilita beaucoup les choses, d’abord en étant quasiment son agent à Venise, puis en le faisant venir en Angleterre, où le peintre, qui y séjourna de 1746 à 1751, devint également extrêmement populaire. Les collections anglaises les plus prestigieuses, publiques et privées, conservent certains des plus beaux chefs-d’œuvre de l’artiste.

Ses vedute, traversant les modes, semblent posséder un charme éternel. La peinture de Canaletto est réputée capter plus que la lumière, l’atmosphère d’un paysage urbain, avec une vibration sensible et singulière. On a dit que cette clarté limpide était celle d’un homme fidèle à l’esprit des Lumières, dont la vision du réel reste très personnelle.

Les reproductions d’une cinquantaine d’œuvres du peintre, sélectionnées avec rigueur, et provenant des plus grands musées et des collections souvent historiques, sont présentées dans cet ouvrage, ainsi qu’un choix conséquent de dessins, dont ceux tirés de son célèbre cahier conservé au Cabinet des dessins et des estampes des Gallerie dell’Accademia de Venise.

Parmi les auteurs de l’ouvrage figurent Annalisa Scarpa, commissaire de l’exposition et directrice de la Fondation Terruzzi (Milan) ; Irina Artemieva, conservateur de la Peinture Vénitienne, à l’Ermitage (Saint-Petersbourg) ; Dario Maran, professeur de l’université Co’Foscari (Venise) ; Annalisa Perissa, directrice du cabinet des dessins, Gallerie dell’Accademia (Venise) ; Lionello Puppi, président du Centro Studi Tiziano e Cadore, Pieve di Cadore ; Francis Russell, historien de l’art ; Alain Tapié, conservateur en chef du patrimoine.

Canaletto à Venise, Gallimard / musée Maillol, riche en outils de lecture ; précieusement doré sur tranches, format... à l’italienne ! 224 pages, 39€.

Canaletto, Guardi, les deux maîtres de Venise

Antonio Canal, dit Canaletto (1697-1768), et Francesco Guardi (1712-1793) ont fait de la veduta, bien sûr avec Gaspar van Wittel, Luca Carlevarijs, Michele Marieschi et Bernardo Bellotto, le genre artistique le plus admiré des collectionneurs.

Cela, commencé au siècle des Lumières, dans ce qui allait devenir l’Italie, mais peut-être aussi et surtout en Angleterre, perdure encore de nos jours, et avec frénésie, si l’on en croît les sommets himalayens qu’atteignent leurs cotes respectives.

Cet ouvrage précieux aux reproductions irréprochables réunit l’ensemble des œuvres exposées en 2012 au musée Jacquemart-André, et qui proviennent des plus grandes collections publiques et privées du monde, telles que la National Gallery de Londres, les collections royales britanniques (rappelons ici que le plus gros acheteurs de Canaletto, le Consul anglais à Venise, Smith, revendit sa collection au roi George), le Museo Thyssen-Bornemisza de Madrid, le Louvre, la Frick Collection de New York ou l’Alte Pinakothek de Munich.

De plus la direction scientifique de cet ouvrage a été assurée par la commissaire générale de l’exposition, spécialiste mondiale de la veduta : Bozena Anna Kowalczyk.

Canaletto - Guardi, les deux maîtres de Venise. Fonds Mercator, 206 pages, 39€.

Cartes marines (L’Âge d’Or des), quand l’Europe découvrait le monde

Les cartes portulans, apparues dans les milieux maritimes méditerranéens dès le cours du XIIe siècle, sont le cœur même de cet ouvrage exceptionnel. Elles représentaient, dessinées précieusement et décorées sur parchemin les directions de la boussole et la succession des ports et des mouillages possibles le long des côtes à partir desquelles se découvrait, très progressivement, ce qui restait d’inconnu du monde.

Ces cartes ont accompagné les navigateurs européens dans leurs incessantes quêtes de nouvelles richesses, épices, connaissances et possessions.

Autant qu’instruments utilisés à bords des lourds bateaux, ces portulans révèlent tout autant l’émerveillement devant les nouveautés que les phantasmes qui peuplaient alors dans les esprits les lieux encore inexplorés.

Ce livre réunit les expertises d’une quinzaine de spécialistes européens et fait un point qui fera date sur les connaissances de ce type de cartes et sur le renouveau historiographique.

Mais comment donc les Européens s’y sont-ils pris pour représenter, découvrir, conquérir, et étudier les territoires et peuples du XIVe au XVIIIe siècle.

Cet ouvrage a été désigné par le jury de l’Affaire des catalogues comme l’un des 10 nominés 2012 au Prix CatalPa pour les catalogues d’expositions de Paris.

L’Âge d’Or des cartes marines, ou Quand l’Europe découvrait le monde. BnF / Seuil. Relié avec jaquette, 256 pages, 150 illustrations, 39€.

César. Le Rhône pour mémoire

Cet ouvrage, dirigé par Luc Long et Pascale Picard, rassemble les travaux de 25 chercheurs sur les objets remontés des eaux du Rhône. C’est le catalogue de l’exposition Arles, les fouilles du Rhône. Un fleuve pour mémoire, qui s’était tenue au Louvre du 9 mars au 25 juin 2012.

Il présente le meilleur des résultats des fouilles subaquatiques qui ont été effectuées par le Département des Recherches Archéologiques Subaquatiques et Sous-Marines (le DRASSM), dans le Rhône depuis une bonne vingtaine d’années.

Ces résultats ont mis en avant l’ampleur du réseau commercial qui existait entre le Nord de la Gaule et le Bassin méditerranéen, mais également confirmé le rôle prépondérant que tenait à l’époque la ville d’Arles, essentiel port de transfert de charges entre la mer et le fleuve, et très important lieu de rassemblement de denrées et de recettes fiscales redirigées vers Rome.

Cette exposition, ce livre et ces découvertes ont donné lieu à des polémiques, notamment sur les interprétations divergentes accordées à un buste de César, considéré par certains comme étant le plus ressemblant qui ait été découvert à ce jour.

De fait, plusieurs pièces, remontées en 2007 et 2008 (dont justement ce buste de Jules César), présenteraient un intérêt exceptionnel.

Cet ouvrage a été désigné par le jury de l’Affaire des catalogues comme l’un des 10 nominés 2012 au Prix CatalPa pour les catalogues d’expositions de Paris.

César. Le Rhône pour mémoire. Vingt ans de fouilles dans le fleuve à Arles est une co-édition Actes Sud et Musée départemental Arles antique. 400 pages, 40,50€.

Chat noir (Autour du). Arts et plaisirs à Montmartre (1880-1910)

Rodolphe Salis fonda en 1881 le sulfureux cabaret du Chat noir, qui allait marquer d’une pierre blanche l’histoire de la Bohème artistique, poétique et assez franchement libertaire de Montmartre, où l’esprit de la Commune soufflait encore sur quelques braises.

Le Chat noir devint en effet rapidement le cœur des pulsations des avant-gardes artistiques et littéraires parisiennes, et souvenez-vous que Paris était à cette époque ni plus ni moins que le phare du monde en ces domaines. Ce fut là, dans ce petit "tripot" d’un genre nouveau, que le premier piano fut accepté par la police !

Personne n’osait aller dans la petite pièce du fond ? On y logera les poètes !

L’esprit qui régnait au Chat noir était l’humour, l’absurde, la dérision, la constante irrévérence aux valeurs et mœurs bourgeoises comme religieuses. Quant à la morale, les prostituées, modèles, artistes et poètes, qui se réunissaient dans ses volutes, ne lui accordaient qu’une attention toute relative, captés qu’ils étaient par les discours enfiévrés, les chansons rapeuses et lestes, les plaisirs élevés ou vénéneux, les spectacles de théâtre d’ombre autant que par les boissons...

Abondamment illustré, ce catalogue fait revivre un haut-lieu palpitant, secoué d’utopies, peuplé de dizaines de célébrités, et emporté par un art de vivre sans entrave qui restera l’une des traces pérennes de l’image de Paris pour le monde entier.

Autour du Chat noir. Arts et plaisirs à Montmartre. Skira Flammarion. 192 pages, 25,50€.

Chemetov (Paul). Chacun sa maison

Ce petit catalogue rassemble des éléments d’archives reconstituées, puisqu’un incendie ravageur était radicalement intervenu sur les fonds Chemetov, sur 16 réalisations à hauteur d’hommes, de ce grand architecte plus connu pour ses réalisations monumentales comme Le ministère des Finances, à Paris, ou la Grande Galerie du muséum d’Histoire naturelle.

Elles ont été reconstituées avec la complicité et la participation de ceux qui habitent ou travaillent dans ces maisons ou ateliers. Cela permet de donner aussi la parole à ce partenaire-clé de l’échange avec l’architecte qu’est... le client et ses demandes, plus ou moins facilement "exhaussables".

Ainsi trouvera-t-on au sujet de ces 16 projets, les demandes, les réflexions comme l’approche de Paul Chemetov, les maquettes qui sont l’étape encore utopique et peu critiquable de la conception du bâtiment, et quand il a été réalisé des photos, parfois habités d’enfants courants ou lisant "Peau d’âne"...

Une façon bien vivante de revenir sur "le temps passé, mais pas dépassé, et témoigner de l’actualité de ces projets".

Cet ouvrage a été désigné par le jury de l’Affaire des catalogues comme l’un des 10 nominés 2012 au Prix CatalPa pour les catalogues d’expositions de Paris.

Paul Chemetov. Chacun sa maison. Skira Flammarion. 190 pages très illustrées. 35,50€.

Cheveux chéris, frivolités et trophées

L’objet de ce catalogue est de poser son propos, sur le thème universel des cheveux, au croisement de l’anthropologie, de l’histoire de l’art ancien et contemporain, de la mode et des mœurs.

Sous l’angle de la frivolité, puisque chacun donne tout d’abord une image de sa personnalité par la coiffure... sans aller, mais nous pourrions, jusqu’aux compétitions entre blonds/blondes, rousses et bruns, lisses et crépus...

Comparant les coquetteries des Papous des Hautes Terres de Nouvelle-Guinée ou des belles citadines africaines, ou des "Merveilleuses" du Directoire, ce livre avance vers l’idée d’un matériau humain à modeler, à sculpter, support à la fois de savoir-faire, de la relativité de la beauté, mais aussi objet de perte (par l’âge ou la violence). Symbole aussi du temps qui passe et de la mort.

Par leur usage nostalgique, les cheveux demeurent également des supports de mémoire. Restes humains, reliques, ils conservent un peu de l’aura et de l’énergie de leur propriétaire, quand ce n’est pas du souvenir, du caractère ou de ses sentiments.

Une partie est consacrée à ces mana (pouvoir sacré des ancêtres) qui ont donné naissance, dans le monde, à de multiples objets dits « magiques » ou pour le moins dotés de pouvoirs que l’on tente de s’approprier.

La question du reste et du trophée est ainsi posée et plus largement du statut de certains « objets » campés aux frontières de l’horripilant et de l’insoutenable, interrogeant nos catégories à partir d’une expérience universelle.

Cheveux chéris, frivolités et trophées, Actes Sud / Musée du Quai Branly, 250 illustrations quadri, 272 pages, 42€.

Chine (Les Séductions du palais, cuisiner et manger en)

Cette exposition très savante réalisée en partenariat avec le musée national de Chine a permis de rassembler en France pour la première fois des objets qui ont accompagné durant les millénaires l’exigence constante des Chinois pour la cuisine. À la richesse des explications s’ajoute ici malicieusement dans ce catalogue d’exposition érudit, à cette édifiante histoire de l’élaboration de la cuisine chinoise 32 recettes soigneusement sélectionnées par d’éminentes personnalités en ce domaine.

Elles permettront au lecteur d’expérimenter chez lui en famille ou entre amis, de la meilleure façon qui soit, les merveilleux apports d’un goût mûri au fil des années et des dynasties.

Jean-Paul Desroches, conservateur général du patrimoine, responsable du département Chine au musée des Arts asiatiques - Guimet, commissaire de l’exposition et l’un des grands spécialistes de la culture et de la civilisation asiatiques a dirigé cet ouvrage. Il était assisté de Yu-ju Chen. Françoise Sabban, directrice d’études à l’École des Hautes Études en Sciences sociales, est l’une des spécialistes de l’anthropologie historique et comparée de l’alimentation et de l’histoire des écrits culinaires. Qui dit mieux ?

Les Séductions du Palais, Actes Sud et le musée du Quai Branly, 192 pages, 35€.

Couleurs (Les) du Ciel. Peintures des églises de Paris au XVIIe siècle.

Saviez-vous que les églises de Paris avaient été l’un des plus vastes chantiers artistiques du XVIIe siècle, sous les règnes de Louis XIII et de Louis XIV, et qu’elles renferment encore aujourd’hui des chefs-d’œuvre méconnus ?

"L’art classique naissant venait ainsi habiter l’architecture du Moyen Âge et de la Renaissance, réunissant (alors), dans un même édifice, patrimoine sacré et création contemporaine." (Bertrand Delanoë)

Les réalisations d’artistes tels que Georges Lallemant, Simon Vouet, rappelé d’Italie par le Roi Louis XIII qui en fera son peintre, Nicolas Poussin, Philippe de Champaigne, Pierre Mignard, plus connu pour ses peintures légères, ou Charles Le Brun composent l’une des plus riches collections de la peinture française du Grand Siècle.

Ce qui est aussi très particulier dans les œuvres dont il est question, c’est qu’elles ont été commandées par des Parisiens pour être montrées au peuple de Paris, et non par de riches particuliers pour leur seul regard, dirait Olivier de Rohan Chabot, président de l’association de la Sauvegarde de l’Art français.

Cet ouvrage très illustré raconte l’histoire mouvementée, voire romanesque de cet ensemble exceptionnel. Mais sa première qualité est de donner envie de partir à la découverte des trésors artistiques que recèlent nos églises parisiennes, pour peu qu’elles soient anciennes. Que ne faisons-nous pas ici ce que nous ferions en Italie : entrer dans les églises que nous trouvons sur notre chemin, par curiosité d’esthètes, tout simplement.

Les Couleurs du Ciel. Peintures des églises de Paris au XVIIe siècle. Musée Carnavalet / Paris musées, 376 pages, 49€.

Crumb (R.)

Ce catalogue bilingue français-anglais a été publié à l’occasion de l’exposition Crumb, de l’underground à la Genèse, qui s’est tenue au Musée d’Art moderne de la Ville de Paris.

Auteur américain prolifique résident depuis lurette dans le doux Sud de la France, Robert Crumb est une des figures les plus marquantes de la culture underground américaine, et pour certains l’un des plus grands dessinateurs de ces 50 dernières années.

Il est vrai que son œuvre a profondément marqué la planète de la bande dessinée, et que tous s’accordent à voir en Crumb celui qui a changé le dessin par son trait, d’une énergie transgressive et d’une densité sans égales.

Ce livre suit le cheminement graphique de Crumb depuis ses premiers dessins dans les revues Help !, Zap et Weirdo, jusqu’aux planches de son dernier album La Genèse, adaptation littérale du premier livre de la Bible, et en englobant certains de ses carnets de dessins qui n’avaient jusqu’alors jamais encore été publiés.

L’ouvrage est enrichi de textes français/anglais de Sébastien Gokalp, Joann Sfar, Jean-Pierre Mercier, Todd Hignite et Jean-Luc Fromental.

R. Crumb, Paris Musées, relié, 220 dessins inédits ou rares, 252 pages, 30€.

Dali

Certains ont dit très justement que, de même qu’il fallait imaginer Sisyphe heureux, il faudra bien un jour imaginer Dalí sincère...

Il est vrai que ce Salvador-là demeure un paradoxe. Figure magistrale de l’histoire de l’art moderne, Dalí est certainement l’artiste le plus populaire. Il est l’un des principaux dont les images icôniques se sont enfouies dans nos mémoires, tout au moins pour les plus anciens, et ont investi le grand patchwork de notre société.

Désarçonnant, extravagant, il endossait auprès du grand public avec une telle théâtralité la figure du fou, qu’aujourd’hui encore Dalí demeure cet artiste controversé, souvent dénoncé pour son cabotinage, son goût de l’argent, et ses prises de position politiques provocatrices, désuètes et parfois nauséabondes.

L’ouvrage monographique de référence (400 images et des contributions des plus grands spécialistes) qu’est le catalogue de l’exposition Dalí traite, en plus de l’œuvre, de l’artiste et de sa personnalité, couvrant 60 ans d’une carrière extraordinaire.

Il a été établi sous la direction des 4, excusez du peu, commissaires de l’exposition, Jean-Hubert Martin, Montse Aguer, Jean-Michel Bouhours et Thierry Dufrêne.

Dali. Relié, 384 pages, 450 illustrations couleur, 49,90€.

Danser sa vie, art et danse de 1900 à nos jours

Le catalogue de cette exposition au sujet ambitieux a été publié par le Centre Pompidou.

Il est absolument indispensable et ajoute à l’événement ce qui lui a été parfois reproché : la présentation plus exhaustive de cet historique de la danse de 1900 à nos jours, et la maîtrise d’un concept (art et danse) menée en continuité.

Ainsi constitue-t-il un document d’une grande richesse que tous les amateurs et passionnés de danse devraient se procurer dans les meilleurs délais... Ce catalogue sera très vite "collector".

320 pages, richement illustré, 49€.

Degas et le nu

Cette exposition du musée d’Orsay soulignait le fait que, comme les danseuses et les chevaux, le nu avait occupé chez Degas une place prépondérante bien que peu soulignée. Et il le prouva dans la pratique qu’il en fit, de l’approche académique et historique de ses débuts jusqu’à l’inscription du corps dans toute sa modernité et la quotidienneté de son intimité.

Degas représente, dans toutes les techniques qu’il utilise, peinture, sculpture, dessin, estampe, et pastel, le corps dans toute sa vérité, qu’il s’agisse de prostituées dans les maisons closes ou de femmes dans leur cabinet de toilette, mêlant satire mordante ou maussade, tendresse tangible, comme attention purement clinique au mouvement.

Contient un intéressant entretien sur Degas de Lucian Freud.

Ce catalogue est une somme aux illustrations particulièrement soignées et aux textes enrichissants. Un très bel ouvrage.

Degas et le nu. Hazan. 24,7x27,3cm, 352 pages, 39,95€.

Delsaux (Cédric). Dark Lens.

Le cadre n’est jamais trop petit pour que ce photographe n’y place ensemble le réel et le fantastique. Banlieues, parkings ou impasses crasseuses accueilleront toujours et encore quelques personnages plus ou moins sympathiques de la saga Star Wars.

Nous assistons impuissants à la naissance involontaire d’une "mythologie de la banalité", quand notre imaginaire s’est lentement, puis de plus en plus brutalement, laissé envahir de tant de références qui deviennent, en bousculant le reste, une part de plus en plus grande de notre mémoire...

Vous êtes photographe ? Passionné de science-fiction ? Amateur des mondes inter galactiques ? Plongez dans ce livre d’immenses photos si tranquilles.

Textes de George Lucas, qui vante "ce travail exceptionnel", et de Kazys Varnelis, directeur du Network Architecture Lab à Columbia University, qui décrypte les multiples facettes de l’univers "delsien". Un livre à succès.

Cédric Delsaux. Dark Lens. Éditions Xavier Barral. 108 pages, 340x260mm, 50 photos couleurs. 39,95€.

Delvoye (Wim) : Au Louvre

Cette exposition, d’autant plus révolutionnaire qu’elle s’est tenue au musée du Louvre, méritait peut-être plus qu’une autre de laisser une trace dans un catalogue, tellement la rencontre était rare et précieuse.

Pensez : un iconoclaste tel que Wim Delvoye glissant ainsi ses œuvres un peu partout, Hall Richelieu, dans les appartements de Napoléon III et sous la pyramide de Pei !

Miracles supplémentaires : les photos, qui présentaient en général de vraies difficultés, sont réussies et de toute beauté, la qualité des reproductions de haute tenue, et l’ouvrage est bilingue français-anglais.

Par toutes ses qualités ce catalogue a pleinement mérité la préface du président-directeur du Louvre, Henri Loyrette, et l’entretien avec l’artiste de la commissaire de l’exposition, Marie-Laure Bernadac, "Wim Delvoye, un artiste argothique", ne manque ni de sel, ni de simplicité dans l’énoncé, de part et d’autre, ni d’une proximité complice dont le lecteur tirera le plus grand profit.

De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace...

Cet ouvrage, désigné dans un premier temps par le jury de l’Affaire des catalogues comme l’un des 10 nominés 2012 au Prix CatalPa, s’est vu décerné une Mention spéciale au Prix CatalPa 2012 pour les catalogues d’expositions de Paris.

Wim Delvoye : Au Louvre. Sous la direction de M.-L. Bernadac, co-édition Fonds Mercator / musée du Louvre, 29,7x24,5cm, 96 pages, 60 illustrations, et design... Wim Delvoye, bien sûr. 25€.

Wim Delvoye, Introspective. Cette prestigieuse monographie consacrée au travail de Wim Delvoye, publiée à l’occasion de l’invitation qui lui était faite par le Louvre, présente un panorama complet sur cet acteur essentiel de l’art contemporain.

Elle en explore les principaux vecteurs, parfois bien étonnants, tissés souvent d’humour, d’irrespect et également de déférence déguisée aux grandes traditions artistiques comme à ce que peut donner d’harmonieux accouplements triolistes entre le savoir-faire artisanal, l’imagination libérée des plus grands designers, et la capacité de calcul difficilement mesurable dont nous gratifie aujourd’hui l’informatique.

Cet ouvrage, dont la couverture est elle-même une œuvre de l’artiste, contient des éclairages enrichissants et de puissantes analyses sur le travail de l’artiste d’éminentes personnalités : Adrian Dannatt, Bernard Marcadé (notamment sur la prolifération et le barbarisme), Dirk Snauwaert et Bart Verschaffel.

Olivier Duquenne y livre aussi une biographie de Wim Delvoye savoureuse.

Wim Delvoye, Introspective. Fonds Mercator. 400 pages. Couverture rigide. 69,95€.

Dessein du geste (Le). Savoir faire et design français.

Contre l’idée que des hiérarchies s’établiraient entre designers et artisans. Voilà de beaux exemples entre eux d’échanges fertiles, fluides, qui installent, conduisent au sens moteur du terme une tradition quelques fois séculaire de haute tenue des objets d’usage qui peuvent être parfois d’apparat.

26 entreprises, artisanales ou industrielles, s’adressent ainsi, sous nos yeux, avec continuité, aux designers contemporains pour que les nombreuses suggestions et évolutions apportées à leurs produits, parce qu’ils progresseront, permettront de maintenir la réputation continue d’excellence de ces entreprises.

Toujours se régénérer est aujourd’hui plus que jamais une ardente nécessité.

Ce livre dévoile le travail des plus prestigieuses maisons françaises, souvent en présentant pour chacune d’elles deux objets. L’un, emblématique de son savoir-faire spécifique, et le second étant le fruit d’une collaboration avec un designer français contemporain.

Ce volume de référence tente l’impossible : faire comprendre le délicat mariage de la créativité des designers avec le savoir-faire des meilleurs artisans.

Par respect pour son sujet, sa fabrication se devait d’être particulièrement soignée et contemporaine : couverture à la Bodonienne, impression sérigraphique et vernis, dos toilé, 3 papiers différents le composent, Offset, gloss et couché mat.

Le Dessein du geste. Savoir faire et design français. Skira Flammarion, 280 pages, 49,90€.

Doisneau (Robert), Paris Les Halles

Avec le thème de cette exposition, Robert Doisneau est au cœur même de son sujet de prédilection, et de sa passion intime. En effet, la première photo qu’il prît des Halles date vraisemblablement de 1933, "Des Filles au diable", sur lequel deux jeunes femmes se laissent transporter sur un charreton par un fort des halles... Doisneau restera fidèle à ce quartier 40 ans durant, revenant sans cesse sur l’ouvrage le visiter, le flairer, prendre son pouls, suivre ses mutations et presque chacune de ses nouveautés.

Quelques photos sont... en couleurs !

Avec ce catalogue, dont le texte de Vladimir Vasak, et les photos sensibles de Doisneau, Paris retrouve un peu de son ventre, de son esprit, et de sa gouaille. Baltard s’efface progressivement, et le lecteur s’étonnera de ressentir un poil de nostalgie.

Doisneau Paris les Halles, Flammarion, 27,5x22cm, 160 pages, 30€.

Enfants (Les) du Paradis

Nul n’ignore que les répliques étincelantes de ce film demeurent gravées dans nos mémoires. Elles furent servies par d’inoubliables acteurs : Arletty « On m’appelle Garance… », Pierre Brasseur (Frédérick Lemaître), Marcel Herrand (Lacenaire), Jean-Louis Barrault (Baptiste), Maria Casarès…

Mieux que la plus belle réalisation du duo Carné - Prévert, Les Enfants du Paradis est le trésor collectif d’un grand quatuor qui ajoute aux deux premiers, Kosma pour la musique et Trauner pour les décors.

Ce chef-d’œuvre romantique, soufflé par l’acteur Jean-Louis Barrault au poète Jacques Prévert, amoureux du vieux Paris, du théâtre et du boulevard du Crime, et même de l’assassin libertaire Lacenaire, est surtout et avant tout l’histoire impossible d’un amour fou entre Garance, fine fleur du pavé parisien, et le mime Deburau.

Ce livre, édité à l’occasion de la grande exposition consacrée aux Enfants du Paradis à la Cinémathèque française, s’attache à faire la part belle aux documents exceptionnels rassemblés à l’occasion. Une merveille dont la réalisation a épousé quelques années terribles de l’histoire de France, et qui fut le premier film de notre pays libéré. Attention, patrimoine universel.

Trophée réalisé par le sculpteur Arnaud Kasper, © de l’artiste

Cet ouvrage, désigné dans un premier temps par le jury de l’Affaire des catalogues comme l’un des 10 nominés 2012 au Prix CatalPa, a reçu le Prix CatalPa 2012 pour les catalogues d’expositions de Paris. Ce prix était décerné en 2012 pour la première fois.

Recevaient pour cet ouvrage le Prix CatalPa 2012 pour les catalogues d’expositions de Paris, Laurent Mannoni, conservateur à la Cinémathèque française, Stéphanie Salmon, de la Fondation Jérôme Seydoux - Pathé, et Line Celo, qui en fut la graphiste, au nom des éditions Xavier Barral. Photo Marius Péan de Ponfilly, DR.

Les Enfants du Paradis, coédité par la Cinémathèque française, la Fondation Jérôme Seydoux-Pathé et les éditions Xavier Barral. 264 pages, 300 documents n&b et quadri, 230x285mm, 48€.

Gallen-Kallela (Akseli)

Akseli Gallen-Kallela (1865-1931) est considéré comme l’un des principaux artistes du génie finlandais dans les années intenses du tournant des XIXe et XXe siècles.

Ses liens avec Paris ont été étroits, puisqu’il fut d’une part élève de l’Académie Julian dans les Années 1880, puis connut d’autre part un véritable triomphe lors de l’Exposition universelle de 1900 en réalisant les fresques du pavillon finlandais sur des thèmes tirés de l’épopée mythique du Kalevala, recueil de vieilles chansons caréliennes "du peuple finnois d’antan".

Il exposa de nouveau à Paris en 1909 avant de s’embarquer pour l’Afrique d’où il ramenait une flamboyante série de peintures et d’aquarelles.

Cet ouvrage présente la brillante carrière artistique d’Akserli Gallen-Kallela et son œuvre sensible, violente, polymorphe (peinture, dessins, gravures, fresques) où s’imbriquent réalisme, néoromantisme, symbolisme, tout en laissant une place aux arts décoratifs (décoration, meubles, tapisserie). Ainsi pourrions-nous dire qu’il fut autant nomade géographique (Finlande, France, Allemagne, Italie, Afrique orientale britannique) que dans ses arts et ses modes d’expression.

Ainsi, la richesse du travail de ce grand peintre ne peut-elle être réduite à l’expression d’un sentiment national ou de l’illustration de mythes finlandais.

Les auteurs de cet ouvrage sont Laura Gutmann-Hanhivaara, du musée d’art Amos Andersen d’Helsinki, Magdalena M. Moeller, directrice du Brücke-Museum de Berlin, Fabienne Chevalier, du musée d’Orsay, et de Philippe Thiébaut, conservateur général au musée d’Orsay.

Akseli Gallen-Kallela, Musée d’Orsay / Hatje Cantz, 204 pages, 42€.

Gaulois ? (Qui étaient les)

Le renouvellement des données dont nous disposons aujourd’hui sur les Gaulois provient en grande partie des découvertes effectuées par l’Institut national de recherches archéologiques préventives. Sanguinaires ? Barbus ? Engloutisseurs de sangliers ? Vêtus de peaux de bêtes ?

Élaboration à travers l’histoire de l’image du Gaulois, vestiges, rites et pratiques de cette société, etc. Étaient-ils des Barbares ou leur civilisation était sophistiquée ? Jusqu’à quel point ? Vous en serez étonnés !

Le livre-catalogue « Qui étaient les Gaulois ? », sous la direction de François Malrain et Matthieu Poux, est coédité par les Éditions de La Martinière et Universcience Éditions. 212 pages, 21,6x23cm, 29,90€.

Hiroshige, l’art du voyage

Le peintre Hiroshige fut-il plus populaire au Japon que le grand Hokusai, son aîné ? L’affaire se discute. En France et en Occident, les œuvres d’Hokusai ont été largement présentées, quand celles d’Hiroshige restaient plus confidentielles.

Pourtant, considéré comme plus important par bien des amateurs d’art asiatique, ce fut lui dont l’influence fut la plus forte sur les impressionnistes notamment, et tout spécialement sur Van Gogh. Ce livre est d’ailleurs à rapprocher du Vincent van Gogh, rêves de Japon.

Peintre du voyage, Hiroshige va, crut-on un temps, inlassablement parcourir le Japon (en fait il s’inspirait très largement de guides de voyages très illustrés de l’époque, et ne voyagea que très… raisonnablement) en immortalisant un monde aujourd’hui disparu, ce Japon du début du XIXe siècle, celui des villages tel que notre imaginaire se le représente encore.

Hiroshige va se rendre célèbre par ses estampes des 50 étapes du trajet de la route du Tokaido à travers les villages et les villes entre Edo (qui deviendra Tokyo), et Kyoto (la capitale impériale d’alors).

Les reproductions ont des couleurs, selon moi, un peu exagérées, mais l’ouvrage ne manque pas d’intérêt compte tenu de la place trop mince que l’on accorde aujourd’hui à ce peintre japonais de talent dont l’influence fut si large.

Hiroshige, l’art du voyage, Pinacothèque de Paris, Gourcuff Gradenigo, relié, 176 pages, 49€.

Hollandais (Ilone et George Kremer, Héritiers de l’Âge d’Or)

Ce catalogue, qui a été publié à l’occasion de l’exposition « L’Âge d’Or hollandais - La collection Kremer », qui s’est tenue d’octobre 2011 à mars 2012 à la Pinacothèque de Paris, présente l’exceptionnelle collection de maîtres hollandais qu’Ilone et George Kremer ont rassemblée en plus de 16 années.

De Rembrandt à Frans Hals, en passant par Pieter de Hooch, Gerrit Dou, Gerrit van Honthorst, Michael Sweerts, ces œuvres, outre qu’elles sont des pièces historiquement de grande valeur, présentent le plus haut intérêt au plan artistique.

Une place importante est également consacrée à d’autres maîtres, certes aujourd’hui moins connus, mais qui à cette époque furent aux yeux du public tout aussi essentiels.

La partie théorique de l’ouvrage est consacrée à l’avènement au pouvoir de la bourgeoisie aux Pays-Bas (tout au long du XVIIe siècle), et à son univers, une nouvelle classe de marchands qui s’enrichissaient, collectionnaient et s’installaient petit à petit dans le rôle d’une autre classe dirigeante, à l’égal des aristocraties du reste de l’Europe.

Ce livre précieux démontre également la puissante influence qu’exerçait l’art et la réputation du Caravage (sa biographie est apparue à Haarlem en 1604), sur l’art hollandais de l’époque, qui cultivait le clair-obscur comme aboutissement d’un parcours : scènes de genre, rapports sociaux entre les différents métiers dans ce siècle d’exception, portraits, natures mortes et paysages, tableaux narratifs, parmi les plus remarquables et les plus représentatifs de l’art hollandais.

Une véritable section d’un classique « catalogue » réunit les 57 œuvres qui furent montrées à cette exposition exceptionnelle, et propose pour chacune une notice détaillée sur le peintre ainsi qu’une analyse de chacun des tableaux.

Ilone et George Kremer, Héritiers de l’Âge d’Or hollandais. Pinacothèque de Paris, 280 pages, 45€.

Intérieurs romantiques. Aquarelles, 1820-1890. Ce joli petit catalogue présente l’ensemble des scènes d’intérieurs en couleur provenant de la Donation Thaw au Cooper-Hewitt, National Design Museum de New York, à partir desquelles cette exposition a pu être organisée au musée parisien de la Vie romantique.

On y décèle lisiblement le luxe dont parlait Georges Bataille dans son livre La Part maudite. Les têtes couronnées sont encore là, alors que déjà la bourgeoisie, comme son mobilier ou la grenouille de la fable, enfle, enfle, enfle.

Très belle images de ces intérieurs, où l’on remarquera les notables différences selon les pays, et quelques étrangetés soudaines : cabinet chinois ou japonais, ou intérieurs lumineux où plaisir et confort annoncent le prochain objectif que seront les loisirs.

Intérieurs romantiques. Paris Musées, 216 pages, 30€.

Juifs d’Algérie

Catalogue d’une exposition dédiée à l’histoire de la présence juive en Algérie, de l’Antiquité au XXe siècle. Entre trajectoires individuelles, sagas familiales et grande histoire événementielle, cet ouvrage contient 9 essais illustrés par de nombreuses images et des documents inédits issus d’archives familiales.

Qui se rappelle encore, 50 ans après les Accords d’Évian, de ce qu’était le judaïsme en Afrique du Nord ? Aujourd’hui, la transmission transgénérationnelle peine à s’opérer, brouillée entre clichés et oubli. Quelques images enferment encore et occultent les cultures comme l’histoire des juifs d’Algérie.

Documents, monuments publics, objets, archives peuvent resemer des souvenirs en traces. Les juifs de là-bas restent les héritiers d’une histoire deux fois millénaire.

Une frise chronologique se développe au fil des chapitres. Peut-on relier Histoire et intimités ou destins familiaux ?

Juifs d’Algérie, Skira Flammarion et le musée d’Art et d’histoire du judaïsme, 272 pages, 35,50€.

Labrouste (1801-1875), architecte. La structure mise en lumière

Il s’agit de la première monographie sur Henri Labrouste. Très illustrée, elle s’attache à présenter la modernité de cet architecte et sa résonance jusqu’au XXe siècle. Elle reprend le déroulé de l’exposition : le voyage en Italie, les bibliothèques, et la postérité.

La bibliothèque Sainte-Geneviève (place du Panthéon) et la salle de lecture de la bibliothèque Richelieu sont les deux chefs-d’œuvre de Labrouste.

Ils révèlent l’essence de cette architecture du fer et de la fonte : simplicité dans la monumentalité, intelligence constructive, renouveau de l’ornementation, recours aux inscriptions et fascination pour les jeux d’ombre et de lumière.

La mise en valeur du métal, inventive et audacieuse, a retenu l’attention de certains historiens du XXe siècle qui voient en Labrouste un pionnier de la modernité.

Labrouste (1801-1875), architecte. La structure mise en lumière. Éditions Nicolas Chaudun, en coproduction avec la Cité de l’architecture et du patrimoine, The Museum of Modern Art de New York, la BnF, et sous la direction des commissaires de l’exposition : Corinne Bélier, Barry Bergdoll, et Marc Le Cœur. 272 pages, 42€.

Lavier (Bertrand), depuis 1969

Cette nouvelle monographie de référence sur Bertrand Lavier a été dirigée par Michel Gauthier, conservateur au Musée national d’art moderne.

L’artiste, qui s’affirme de plus en plus comme l’une des figures majeures de la scène artistique contemporaine française, fait à nouveau preuve dans cet ouvrage d’esprit, de finesse et d’humour, d’un goût du paradoxe, bien sûr, mais il nous apprend essentiellement à rester en éveil, en hyper vigilance, et à ne pas prendre pour argent comptant ce que l’on nous donne à voir... puisque rien n’est gratuit !

Peintures monochromes, peintures gestuelles, peintures filmées, objets peints, objets superposés, objets détruits, objets soclés, tableaux et sculptures, d’après Walt Disney, tirés de vieux numéros du journal de Mickey, néons d’après des œuvres de Frank Stella, éclatantes photographies de statues du musée Grévin à la sauce du studio Harcourt, moulages en bronze nickelé de statuettes africaines, ou mon préféré, le double croche-pied du Château des papes d’après Signac, comprenne qui voudra...

Si Bertrand Lavier sait mettre en scène le concept tout en préservant les droits du visible et de la forme, il taille de manière artistique dans l’art, jardinier qu’il fut, comme on redonne visage végétal à une haie.

Si l’impression de ce catalogue est un peu épaisse, il recèle une passionnante Chronologie indicative de Pierre Tillet, savamment illustrée.

Bertrand Lavier, depuis 1969, Centre Pompidou, 176 pages, 135 illustrations couleur. 34,90€.

Mascarades et Carnavals

Qu’il s’agisse des sorties de masques en Afrique subsaharienne ou de carnavals dans les Caraïbes, au-delà de leurs spécificités, tous ces événements se vivent comme des rituels, des moments partagés, qui participent bigrement à renforcer les liens du groupe.

Le fait de les aborder dans un même ensemble révèle les caractéristiques essentielles des mascarades et des pratiques carnavalesques avec leurs enjeux, symboliques, religieux, sociaux, politiques, et tendant tout cela, esthétique.

Quels sont les rôles des masques, des costumes et des travestissements dans la transformation des individus ?

Mises en scène, les mascarades deviennent de véritables performances. En Afrique, elles apparaissent fréquemment dans des contextes liés à l’initiation et au pouvoir masculin, même si elles recouvrent des pratiques très différentes dans lesquels l’enseignement côtoie le divertissement.

Aux Antilles, en Guyane et au Brésil les carnavals urbains qui se sont développés racontent l’histoire d’un pays dans toute sa diversité. Les imaginaires s’y abreuvent.

Au bout de ces comptes-là, carnavaliers comme porteurs de masques font tout autant évoluer leurs pratiques que suivre stricto sensu les traditions. N’assistons-nous pas dans ces moments si particuliers aussi à la projection d’un regard moderne volant au-delà de chacune de ces sociétés ?

Mascarades et Carnavals. Musée Dapper. Écrit sous la direction de Christiane Falgayrettes-Leveau. 328 pages, 33€.

Mathématiques, un dépaysement soudain

Le catalogue de l’exposition Mathématiques, un dépaysement soudain, fruit d’une collaboration étroite avec tous les prestigieux intervenants du projet.

Ce sont les 6 mathématiciens qui ont engagés un dialogue direct avec les artistes invités : Sir Michael Atiyah (médaille Fields 1966, prix Abel 2004), Alain Connes (médaille Fields 1982), Nicole El Karoui, Misha Gromov (prix Abel 2009), Cédric Villani (médaille Fields 2010) et Don Zagier (prix Cole 1987). D’origines géographiques et de champs mathématiques variés, ils figurent parmi les chercheurs les plus reconnus aujourd’hui dans leurs domaines.

Ils ont été accompagnés dans l’aventure que constituait cette exposition, comme dans ce catalogue par 8 artistes : Jean-Michel Alberola, Raymond Depardon et Claudine Nougaret, Takeshi Kitano, David Lynch, Beatriz Milhazes, Patti Smith et Hiroshi Sugimoto.

Cet ouvrage hors normes devient un outil artistique, ludique et presque indispensable à qui veut approfondir les problématiques liées à cet ambitieux sujet.

Pensé comme un espace d’échanges, il propose aux mathématiciens et aux artistes de mener une réflexion commune sur les grandes questions que soulèvent les mathématiques.

Des entretiens croisés permettent de confronter les points de vue de chacun et de développer les sujets abordés dans l’exposition.

Mêlant textes, questionnaires et portraits, l’ouvrage montre la diversité de la pensée mathématique, énoncée par des scientifiques ou des artistes, et souligne l’importance de la création dans ce domaine.

Ce livre exigeant et accessible fait la part belle à la transcription visuelle des mathématiques et offre au lecteur un parcours atypique dans le monde des mathématiques en en dévoilant toute la beauté poétique.

Cet ouvrage a été désigné par le jury de l’Affaire des catalogues comme l’un des 10 nominés 2012 au Prix CatalPa pour les catalogues d’expositions de Paris.

Mathématiques, un dépaysement soudain. Fondation Cartier pour l’art contemporain, Paris. Relié, 216 pages, 100 illustrations, un CD inédit de la bande son de l’exposition est inclus, avec des textes lus par Patti Smith, sur une musique spécialement créée par David Lynch. 44€. Diffusion Actes Sud.

Mayas (Les Masques de jade)

Ce catalogue rend compte d’une décennie de recherches et de restaurations, menées par les plus hautes institutions mexicaines, sous la responsabilité de Sofía Martínez del Campo Lanz, experte renommée, et auteur des textes de l’ouvrage.

Ces masques exceptionnels, entièrement restaurés, représentent les visages de la divinité. Ils ont été créés pour les puissants maîtres des anciennes cités mayas, et leur mission était d’assurer la vie éternelle après leur mort à ces hauts personnages.

Les pièces de l’exposition sont reproduites intégralement dans ce beau livre, accompagnées des vues d’ensemble des sites archéologiques en couleur et de schémas explicatifs.

L’approche scientifique, associée à des encarts explicatifs, permettra aux connaisseurs comme aux néophytes d’approcher plus justement et de comprendre ce qui faisait la richesse, l’originalité et la profondeur de la culture maya : astronomie, mathématiques, système d’écriture composé de glyphes, etc.

Une occasion unique de conserver les images et explications sur ces pièces archéologiques si fortement symboliques et qui ne sont venues en France que de façon tout à fait exceptionnelle.

Les Masques mayas de jade. Coédition Éditions Pinacothèque de Paris et Gourcuff Gradenigo. Relié, 24,5x28,5cm, 312 pages, 49€.

Médiums (Entrée des). Spiritisme et Art de Hugo à Breton

Tenter un regard historique sur les productions spirites, au moment de l’apparition de cette croyance en la parole des "désincarnés"...
Comme se sont-elles intégrées à la sphère artistique autour de la notion d’automatisme du surréalisme.

L’épisode spirite des "tables parlantes" de Jersey aura eu une influence majeure sur la pensée et la création de Victor Hugo, illustrée par les manuscrits des procès-verbaux relevés durant les séances et les portraits des participants. Le rôle de Charles Hugo, photographe et medium y est évident.

De nombreuses œuvres d’autres artistes médiums : Victorien Sardou, Fernand Desmoulins, Léon Petitjean, mais aussi Hélène Smith célèbre médium suisse dont l’étude conduit à une interprétation de la production médianimique comme "message automatique" de l’inconscient, concept proche de ceux que Freud développe à la même époque.

Charles Richet fonde en 1919 l’Institut Métapsychique International crée pour étudier ces phénomènes médiumniques. André Breton s’y intéresse et publie en 1933, dans la revue Minotaure, " Le Message automatique ", qui constitue une anthologie et une interprétation faisant entrer les productions spirites dans la sphère artistique, par le biais de l’automatisme, concept central du surréalisme.

Cet ouvrage est illustré d’œuvres picturales mais aussi de productions "littéraires", d’une importante sélection de dessins de Victor Hugo, de récits de Victorien Sardou explicitant ses dessins, d’œuvres du peintre Fernand Desmoulins, écriture martienne et glossolalies d’Hélène Smith...

Entrée des Médiums. Spiritisme et Art de Hugo à Breton. Paris-Musées, livre précieux, 184 pages, 35€.

Modigliani, Soutine et l’aventure de Montparnasse. La collection Jonas Netter

Jonas Netter débutera tôt et modestement ses achats dans l’art, en s’intéressant dans un premier temps à des artistes alors peu connus. Il sera le premier acheteur et le vrai soutien du marchand Léopold Zborowski.

Ainsi deviendra-t-il assez vite, à partir de 1916, le principal collectionneur de tableaux de Modigliani, puis de Soutine. Il s’intéressera également à Maurice Utrillo, à Suzanne Valadon, et n’hésitera pas à élargir sa collection à d’autres artistes de l’École de Paris, également défendus par Zborowski.

On trouvera encore dans cet ouvrage quelques belles toiles de André Derain, de Jeanne Hébuterne (la compagne de Modigliani), des Moïse Kisling (dont un portrait de Netter), des Maurice de Vlaminck, et des tableaux d’une douzaine d’autres peintres, dont Michel Kikoïne et Isaac Antcher. Un choix peut-être un peu disparate... mais les Modigliani et les Soutine sont de toute beauté, comme les Derain.

La Pinacothèque de Paris a pu rassembler pour cet événement 123 tableaux, représentant une notable partie de la collection Netter, dont ces œuvres remarquables de Modigliani et de Soutine qui, pour certaines, n’avaient encore jamais été vues.

La Collection Jonas Netter. Modigliani, Soutine et l’aventure de Montparnasse, Marc Restellini
, 288 pages, relié
, 49€.

Morisot (Berthe)

Il existe d’elle une biographie documentée, fine, sensible, assez romantique et passionnante de Dominique Bona, Berthe Morisot, le secret de la femme en noir, publiée chez Grasset, et aujourd’hui en poche.

Le catalogue Berthe Morisot, 1841-1895, publié par Hazan pour le musée Marmottan Monet est également remarquable (264p, 35€). Superbes reproductions et commentaires extrêmement documentés. À recommander, pour sa riche bibliographie, sa chronologie et les œuvres graphiques de la collection du musée.

Rechercher également, bien que plus rare, celui publié en 2002 par la Fondation Pierre Gianadda, devenu rare (464p.).

Moyen-Âge : La demeure médiévale à Paris

Si pour les Parisiens les plus curieux les grands hôtels de Cluny, de Sens, ou de Clisson font partie des monuments familiers de la capitale, combien connaissent les quelques dizaines d’autres demeures plus modestes ou les grandes caves du Moyen Âge, décorées, parfois sur plusieurs étages, où l’on remisait les denrées ?

Ces trésors méconnue que nous a laissé l’Histoire n’avaient jusque-là pas toujours eu la place qu’ils auraient mérité dans les ouvrages d’études alors même que ce fut pourtant cette époque qui donna à la plupart de nos villes anciennes leur forme ou structure encore actuelles, suscitant des types d’habitats améliorés et s’adaptant aux nouveaux besoins des habitants de la Cité.

Paris qui, avec ses 200 000 habitants et ses milliers de maisons et d’hôtels, fut au XIVe siècle la plus grande ville de l’Occident médiéval, joua un rôle de tout premier plan dans l’élaboration de ces modèles résidentiels pérennes. Ce sont en grande partie encore eux qui nourrissent la création artistique ou littéraire, et notre imaginaire.

Cet ouvrage a été établi à l’occasion d’une exposition tenue aux Archives nationales, au cœur du Marais, ces deux arrondissements, les IIIe et IVe, qui concentrent le plus grand nombre de constructions qui nous soient restées de cette époque : grands hôtels, demeures bourgeoises, vestiges décoratifs.

Il réunit les enseignements d’un ensemble de documents rares sur ce patrimoine millénaire (archives, images et objets), et dresse le précieux bilan des connaissances les plus récentes sous forme d’essais et d’études de cas établis par des spécialistes issus des diverses disciplines qui contribuent aujourd’hui à la redécouverte de ces témoignages saisissants du paysage monumental d’un passé brillant.

Un ouvrage de référence à conserver, susceptible également de donner aux habitants de la Cité comme à ses touristes des pistes originales pour partir à la découverte d’un Paris devenu insolite et pourtant encore très présent aux regards attentifs.

Ouvrage réalisé sous la direction de Pierre Fournié, Étienne Hamon, Valentine Weiss et Claire Béchu-Bénazet.

La demeure médiévale à Paris. Coédition Archives nationales / Somogy éditions d’Art. Broché avec rabats, 296 pages, 250 illustrations, 24,6 x 28cm. 35€.

Paris vu par Hollywood

Paris est de loin la ville étrangère favorite du cinéma américain d’Hollywood : au moins 800 films, au moins 100 chefs-d’œuvre. Parfois ce qu’il montre de nous pourra nous agacer, "cliché" quand tu nous tiens...

Mais il y a tout de même une indéniable tendresse, parfois un peu rude, dans le Paris recomposé qui nous est présenté ici. Ce livre, catalogue d’une exposition organisée par le maître d’œuvre de cet ouvrage, le rédacteur en chef des Cahiers du cinéma Antoine de Baecque, rassemble sur le sujet les plus fameux critiques français et américains : Jean-Baptiste Thoret, Vanessa Schwartz, Christian Delage ou même Martin Scorsese en personne !

Paris n’a-t-il pas été pour les Américains avant tout un art de vivre avec élégance, un lieu où soufflait une liberté difficilement descriptible, et où le bonheur pouvait presque être atteint ?

Paris libéré ? Mais Paris aussi souvent reconstruit avec une imagination souvent... américaine, à travers des décors parfois improbables, des idées et des émotions... dont certaines nous restent un peu étrangères, mais fabriqués en général par les plus grands des techniciens et réalisateurs du cinéma.

Une surprenante exploration qui connut ses grandes étapes, du cinéma muet de cape et d’épée aux poursuites échevelées des méchants dans des décors terriblement touristiques, à travers plus d’un siècle de cinéma hollywoodien. Une analyse inédite, croustillante et réjouissante sur le cinéma d’Ernst Lubitsch, de Blake Edwards, de Woody Allen, et de tous leurs comparses.

Une promenade passionnante pour cinéphiles, illustrée de très nombreuses photos et de documents souvent inédits.

Paris vu par Hollywood. Skira Flammarion. Couverture cartonnée. 288 pages, 45€.

Pharaons (Le Crépuscule des)

Ce catalogue de l’exposition au titre viscontien « Le Crépuscule des Pharaons : chefs-d’œuvre des dernières dynasties égyptiennes » révèle la richesse et la diversité dont faisait preuve l’art égyptien après que se soient éteintes les Nouvelles Dynasties.

L’opportunité, qu’il ne fallait surtout pas rater, était que cette exposition ait pu rassembler les plus importantes pièces des principales collections internationales pour cette époque : celles du Ägyptisches Museum de Berlin, du British Museum, du Louvre, et du Metropolitan Museum of Art, ce qui est proprement exceptionnel.

Durant cette période longue de dix siècles, souvent sujette aux désordres politiques et aux invasions, le prestige de l’art et des influences de l’Égypte demeuraient considérables dans le reste du monde d’alors.

Non seulement l’art égyptien continuait à profiter de son influence, mais il se dotait au cours de ces siècles d’une maîtrise technique plus grande encore, sa production artistique alliant alors une élégance de proportions, à des formes affinées, et à un souci du détail jusqu’ici inégalé. Au bilan, la statuaire de cette époque, fait preuve et clame une perfection inégalée.

Le Crépuscule des Pharaons. Fonds Mercator. 240 pages. Couverture rigide et jaquette. 45€.

Photographie (La) en cent chefs-d’œuvre

Cet ouvrage, établi sous la direction de Sylvie Aubenas et Marc Pagneux, propose cent des photographies des collections de la BnF. La plus ancienne, un essai de William Henry Fox Talbot, est datée de 1839. La plus récente a été prise à Fos/Mer en 1986 par Lewis Baltz, dans le cadre de la mission de la DATAR.

Selon un parcours ni chronologique ni thématique, mais poétique, il s’agira d’avancer par association, d’image à image, obéissant plus que tout à une logique de rapprochements et de correspondances intellectuelles et formelles des œuvres choisies pour leur beauté, la perfection de leur tirage et leur provenance.

Connaisseur, amateur ou néophyte, le lecteur aura toute facilité de s’abandonner au plaisir de la découverte, qu’il s’agisse de portraits, de paysages, de nus, de reportages, de publicité, ou de photographie scientifique…

Les grands noms de la photographie des XIXe et XXe siècles (Atget, Nadar, Drtikol, Arbus, Degas, Bravo, Hausmann, Cartier-Bresson, Man Ray, Marey, Brassaï, Kertesz, Brandt, Le Gray, ou Gilles Caron, côtoient des personnalités comme Zola, Montesquiou, le cercle d’Hugo, ou Victor Segalen.

Mais que signifie ce concept de chef-d’œuvre appliquée à la photographie ? L’ancienneté de la collection de la BnF, comme ses innombrables sources d’enrichissement, la valide dans cet exercice stimulant.

Ce catalogue offre à 100 personnalités, a priori sans rapport avec le monde de la photographie, de commenter chacune une image susceptible de le faire réagir.

Ce catalogue concourra pour le Prix CatalPa 2013.

La Photographie en cent chefs-d’œuvre, BnF, 196 pages, 100 illustrations, 39€.

Raphaël. Les dernières années

Cet ouvrage est le catalogue de l’exposition, conjointe du Prado puis du Louvre, consacrée aux dernières œuvres de Raphaël (1483-1520) et à celles de ses disciples les plus proches, dont Giulio Romano et Giovanni Francesco Penni.

Il respecte un déroulé chronologique de l’activité de Raphaël des débuts du pontificat de Léon X, en 1513, jusqu’à la mort de l’artiste en 1520.

C’est à cette époque, seconde période de maturité de l’artiste, que se préciseront et s’épanouiront les grandes formules "classicisantes". Ce sera par elles que la renommée de l’artiste s’installera durablement, et que l’idéal d’harmonie de la Renaissance classique traversera sereinement les siècles, solidement fondé qu’il est sur la fusion heureuse de la leçon qui nous parvient de l’Antiquité et du message universel d’alors de l’Église catholique (L’incendie du Borgo, La Chambre de Constantin, La Transfiguration).

Ce beau livre permet d’examiner et de mieux comprendre les questions d’influence et de développement artistique. Il clarifie, autant qu’on le peut les processus créatifs qui conduisirent aux peintures que nous connaissons.

La grande interrogation demeure : dans quelle mesure Raphaël et ses assistants ont-ils été impliqués et entraînés dans des tâches à la fois de création et d’exécution. Des dessins seront inclus dans la présentation.

Raphaël. Les dernières années. Coédition Hazan / Musée du Louvre, 398 pages, 45€.

Reinhardt (Django), Swing de Paris

Django Reinhardt, improvisateur extraordinaire, compositeur intemporel, pionnier de la guitare soliste, est à l’origine du jazz manouche, devenu un genre musical à part entière, et connaissant depuis quelques années déjà un très fort engouement.

Michael Dregni, qui est l’auteur de sa biographie inédite en France, The Life and Music of a Gypsy Legend (Oxford University Press, 2004), retrace, documents d’époque et photographies inédites à l’appui, ce destin légendaire. Nous retrouverons ainsi son enfance dans la « Zone » aux portes de Paris, et ses débuts dans les bals musettes.

Par amour de la musique, courage, et un peu d’entêtement aussi, il parviendra à reconquérir une incroyable virtuosité malgré la perte de l’agilité de deux doigts et de terribles brûlures occasionnés par l’incendie de sa roulotte.

L’auteur raconte la découverte par Django du jazz et du swing, véritable révélation presque mystique, son entente parfaite avec son plus grand complice Stéphane Grappelli, et ses collaborations avec tant de musiciens de renommée internationale.

Django Reinhardt participera aussi aux glorieuses nuits de Saint-Germain-des-Prés…

Ce livre, catalogue de l’exposition dédiée à cet immense artiste à la Cité de la Musique à Paris, rend hommage à l’un des plus nobles et talentueux représentants de la culture populaire française, celui dont le prénom manouche signifie « je me réveille », et celui que Jean Cocteau appelait le « fils de l’air ».

Cet ouvrage, désigné dans un premier temps par le jury de l’Affaire des catalogues comme l’un des 10 nominés 2012 au Prix CatalPa pour les catalogues d’expositions de Paris, a de plus été signalé pour sa grande qualité, le jury soulignant à quel point il lui fut difficile de ne pas le récompenser.

Django Reinhardt, Swing de Paris, Michael Dregni et Vincent Bessières, Éditions Textuel, broché, 224 pages, 39€.

Richter (Gerhard),

À l’heure de ses 80 ans, quand ce peintre survole les ventes d’œuvres d’art par le prix de ses tableaux, quand la rétrospective de son œuvre se pose au centre Pompidou, après la Tate Modern de Londres, et la Neue Nationalgalerie de Berlin, il est plus que temps de mieux comprendre le cheminement artistique d’un des artistes les plus influents de la scène internationale.

Le catalogue Gerhard Richter, Panorama est publié, en collaboration avec la Tate et la Neue Nationalgalerie, à l’occasion de cette vaste exposition rétrospective par les Éditions du Centre Pompidou, sous la direction de Mark Godfrey et Nicholas Serota, avec Dorothée Brill et Camille Morineau, commissaire de l’exposition et conservateur au Musée national d’art moderne. Il couvre toute l’étendue du travail et de la carrière de Richter, et embrasse même la totalité de son œuvre : photos-peintures, abstractions, paysages et marines, nuanciers, monochromes gris, portraits, sculptures de verre et miroirs, dessins et photographies.

Avec les points de vue des plus grands critiques et conservateurs, et près de 300 reproductions, il devient l’ouvrage en français le plus complet sur ce peintre.

Gerhard Richter, Panorama, une rétrospective. 304 pages, 44,90€. Édité par le Centre Pompidou.

Autre livre conséquent, cette monographie de Dietmar Elger, qui suit Gerhard Richter à la trace. Il chemine vers les différentes étapes qui marquèrent sa carrière, et plus que tout, dialogue avec le peintre, et a pris la peine de converser avec de nombreux témoins directs.

Dresde, le Réalisme capitaliste, la recherche permanente, sa constance d’artiste, les changements de dimensions, et aussi cette conversation muette et factuelle, qui se lit si bien sur les toiles, avec Marcel Duchamp... Pour Dietmar Elger, à l’encontre des voies conceptuelles ou des tenants de la mort de l’art, le travail de Gerhard Richter apparait comme un acte de foi dans les possibilités et la capacité illimitée de la peinture à invertir et à décomposer l’image.

"Comment se faire une idée de ce monde ?" Quelle incertitude perpétuelle est-on en droit de revendiquer ? Une somme.

Gerhard Richter, par Dietmar Elger, Hazan, volume relié sous jaquette, 26x31cm, 280 illustrations, 340 pages, 85€.

Robot (Et l’Homme... créa le)

Les robots, objets technologiques multiformes et fascinants nous inquiètent et nous rassurent tout à la fois. Ils augmentent nos capacités, prolongent nos intentions et nous suppléent quand le danger, le risque ou l’ennui des répétitions nous guettent.

Ce qui nous interroge le plus chez eux est peut-être ce qui les distingue des automates : leur adaptabilité au milieu... Pourtant leurs progrès continuent d’être fulgurants, fruits des recherches acharnés ingénieurs et de savants que nous souhaitons sains d’esprit...

Le musée des Arts-et-métiers met ces machines à l’honneur dans une grande exposition dans laquelle sont associés collections patrimoniales et produits industriels à la pointe de la robotique.

Prolongements de la mécanique de précision traditionnelle, de l’électronique et de l’informatique, les robots sont devenus omniprésents dans notre monde et notre quotidien. Les cadences de la grande industrie ne font que confirmer leur fiabilité, leur employabilité dans les situations les plus hostiles ou périlleuses, sur les champs de bataille, en zones polluées ou fortement radioactives, ou encore aux fonds des océans, le fait qu’ils soient également en capacité de porter secours aux êtres humains lors de délicates interventions chirurgicales ou de les assister dans les tâches les plus quotidiennes, même si ces qualités se répartissent entre une multitude de robots très différents les uns des autres forcent de plus en plus notre respect.

Jusqu’où cela ira-t-il ? Ils sont aujourd’hui déjà capables de percevoir et d’interpréter nos gestes et nos émotions. Dorénavant, avec la multitude de services qu’ils nous rendent et qui ne fera que s’accroître, quelle place leur laisserons-nous dans la société de demain ?

Et l’Homme... créa le robot. Coédition Cnam - musée des Arts-et-Métiers / Somogy éditions d’Art, 144 pages, 200 illustrations, 24€.

Rodin : Rodin (1890-1917), 300 dessins. La saisie du modèle

« C’est bien simple, mes dessins sont la clef de mon œuvre », confiait Rodin à l’écrivain René Benjamin, en 1910.

Ultime manifestation de son génie, les dessins d’Auguste Rodin, postérieurs à 1896, permettent de saisir l’extraordinaire tension introduite par l’artiste entre le naturalisme d’un dessin, captant un geste, un mouvement dans toute son immédiateté et sa justesse, et l’indépendance grandissante du trait et de la couleur.

Le sexe de la femme était pour l’Auguste Rodin le suprême lieu de vie, de mystère, et de fascination. Le début de tout, la justification, et plus que tout la grande source, celle de la création, de la sexualité, de la trivialité, et du devenir de tout être et de toute humanité. En fait, le savoir vivre.

Avec plus de 300 dessins reproduits en couleur, la plupart inédits, cet ouvrage éclaire la liberté et l’inventivité de l’artiste, ainsi posé en précurseur des grandes révolutions esthétiques et artistiques du XXe siècle.

Qu’il s’agisse de dessin ou de sculpture, l’incident survenu, la tache, la déchirure, la fente, la brisure, tout devenait motif à poursuivre plus loin, voire à relancer l’artiste à la poursuite de la création…

Autre marque de modernité ? Les couleurs choisies si vives dont il isole certains dessins : orange fort, rouge opéra ou violet !

Rodin (1890-1917), 300 dessins. La saisie du modèle. musée Rodin / Éditions Nicolas Chaudun, 350 illustrations couleurs, 280 pages, 39€.

Rodin, la chair, le marbre

Le marbre est le matériau dont l’artiste a, plus encore que pour un autre, l’obligation d’être au plus près de l’imitation de son modèle, de façon intime, avec une exigence accrue d’obtenir l’illusion de la vie, l’illusion de la chair.

Dans cette exposition qui rassemble 50 sculptures et 10 maquettes, on remarque à l’évidence le talent de Rodin à se jouer de la lumière et des ombres, des clairs-obscurs et des parties sculptées qui ne font qu’incomplètement surgir de la matière encore emprisonnante.

Sujet et motifs curieux chez l’Auguste qui obtient du fini, du précis, ou du flou, peut abuser du non finito, mais finalement transmet ses projets à des façonniers, ce qui lui attirera les reproches de Camille Claudel.

Un beau livre aux textes enrichissants et aux photos particulièrement bien prises. Le minéral est là, avec tout son mystère.

Rodin. La Chair, le marbre, Hazan, volume relié, 21,5x27,5cm, 216 pages, 150 illustrations, 35€.

Plus largement, une splendide anthologie, Écrire la sculpture. De l’Antiquité à Louise Bourgeois, de Claire Barbillon et Sophie Mouquin, a été publiée par Citadelles & Mazenod.

Rouart (Henri), 1833-1912, l’œuvre peinte

Henri Rouart, qui fut collectionneur, mécène, ingénieur et industriel, était aussi un peintre (formé par Corot et Millet), activité qu’il pratiqua avec exigence sa vie durant et entourait d’une certaine discrétion, même s’il exposa avec ses amis impressionnistes.

Sa collection, considérable, comprenait des œuvres majeures des plus grands : le Greco, Corot, Millet, Daumier, Cézanne, Degas, Manet, Monet, Renoir, Gauguin, acquises à l’heure où elles étaient encore quasiment ignorées. À sa mort, sa dispersion attira les plus grands marchands, connaisseurs et représentants de musées.

Les toiles et aquarelles d’Henri Rouart révèlent un paysagiste de talent. Ce fut aussi un portraitiste attentif à saisir ses proches dans leur cadre intime.
Henri Rouart était aussi le grand-père de Ernest Rouart, qui fut l’époux de Julie Manet, fille de Berthe Morisot.

Henri Rouart, 1833-1912, l’œuvre peinte, de Jean-Dominique Rey, 120 pages, 70 illustrations, 29€.

Rubens, Van Dyck, Jordaens et les autres

Cet ouvrage collectif sur les peintures baroques flamandes des Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique permet de se remémorer ce patrimoine flamand unique grâce à la sélection de 41 tableaux des anciens Pays-Bas méridionaux du « Siècle d’Or ».

Nous y retrouvons tous les grands genres, de la peinture d’histoire à la nature morte, en passant par le portrait, la scène de genre et le paysage dans lesquels les artistes du Nord excellaient.

Le choix des œuvres s’appuie sur leur représentativité et leur haute qualité.
Parmi elles, bien sûr Les Miracles de saint Benoît, de Rubens, qu’il réalisa entièrement, et dont le caractère inachevé met à nu la virtuosité de l’artiste.

Le truculent Roi boit, de Jacob Jordaens, montre une fête dans ce qu’elle peut avoir de plus charnelle, exagérée et de plus... flamande. Ici quand on boit on s’empourpre, on chante fort, on exagère.

Parmi les autres chefs-d’œuvre étudiés, Le portrait du jésuite Jean Charles della Faille, œuvre pour que les proches conservent l’image de celui qui ne sera bientôt plus là donne une dimension très humaine à un genre qui nous apparaît souvent un peu compassé.

De grandes réussites dans les autres genres comme le paysage, la scène de genre et la nature morte présents dans cet ouvrage par des tableaux de Paul Bril, Lucas van Uden, David Teniers le Jeune, Frans De Momper, Jan Fyt et Abraham Brueghel, mais aussi par des toiles de maîtres moins connus aujourd’hui mais qui eurent leur heure de gloire, tels Cornelis Schut, Gérard de Lairesse, Jacob van Oost l’Ancien, Jan Siberechts, Gillis van Tilborgh ou David Ruyckaert.

Rubens, Van Dyck, Jordaens et les autres. Peintures baroques flamandes aux Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique. Hazan / Marmottan, 192 pages, 29€.

Shoah C’étaient des enfants. Déportation et sauvetage des enfants juifs à Paris (1940-1945)

Le catalogue de l’exposition : C’étaient des enfants. Déportation et sauvetage des enfants juifs à Paris, est un ouvrage collectif établi par Sarah Gensburger, chargée de recherche au CNRS.

Il se divise en 5 grands thèmes, traités par des spécialistes de disciplines différentes et illustrés par de nombreux documents inédits : identification et exclusion, arrestations et déportations, sauver les enfants, vivre "cachés" survivre après, se souvenir des enfants et de son enfance.

Dans la préface, le maire de Paris Bertrand Delanoë rappelle quelques chiffres : "Plus de la moitié des 11 400 enfants juifs déportés depuis la France entre 1942 et 1944 auront été de petits Parisiens." Publié chez Skira Flammarion. 128 pages. 24,90€.

Soutine (Chaïm)

La palette de Soutine (1893-1943) aux couleurs si flamboyantes exprime sans réserve ni retenue les tourments de l’artiste et une violence brute. Le marchand d’art Paul Guillaume le découvre dès 1922 et s’enthousiasme pour ces « portraits où la mesure et la démence luttent et s’équilibrent ». Il fait connaître cet artiste à la puissance expressionniste et à la palette ardente uniques dans le Paris de l’entre-deux-guerres.

On sait aujourd’hui que cette vision et cette technique de peinture si particulières ont certainement influencé les artistes de la fin du XXe siècle, rendant nécessaire un nouveau regard sur ce peintre qui, encore aujourd’hui, ne laisse personne tiède ou indifférent.

22 tableaux de Soutine, la plus importante collection de peintures de ce peintre de toute l’Europe, rassemblés par Paul Guillaume, sont conservés au musée de l’Orangerie. C’est autour d’eux qu’est composée une exposition monographique qui présente notamment une étude des séries dans l’œuvre de Soutine.

Après une année qui aura vu 2 expositions et deux catalogues consacrés à ce peintre que l’on a dit différent, Soutine restera-t-il encore longtemps incompris en France ?

Chaïm Soutine. Hazan. 208 pages, 35€

Spiegelman (Art)

Qu’un auteur de BD ait obtenu le Prix Pulitzer devrait rendre curieux sur les talents de ce personnage. Le catalogue de l’exposition, CO-MIX, Art Spiegelman présente le grand avantage de nous jeter en pâture une large rétrospective de Bandes dessinées, de graphismes, et de… débris divers, est-il dit avec détachement et hauteur. Nombreux documents inédits avec des archives de tous les styles dont l’artiste est capable. 102 pages, 30€, broché-cartonné, 34x24cm, Flammarion 2012. Réjouissant et surprenant. Deviendra rapidement, ou est peut-être même déjà... un collector.

Maus est une œuvre magistrale et l’un des premiers romans graphiques contemporains. Pour Art Spiegelman : « La BD est parfaitement adaptée à l’autobiographie, en ceci qu’il y a une intimité dans l’acte de lecture d’une BD qui me paraît plus forte que dans la lecture d’un livre.  »

Bibliographie française : Maus, 2 volumes, Flammarion, 1987 et 1992. MetaMaus, Flammarion, 2012. Breakdowns – Portrait de l’artiste en jeune, Casterman, 2008. A l’ombre des tours mortes, Casterman, 2004. Bons baisers de New York, Flammarion, 2003. Be a nose ! , Casterman, 2009. Ouvre, je suis un chien !, Gallimard Jeunesse, 1997. Little Lit, 2 volumes, Seuil, 2002 et 2005. Jack et la boîte, Casterman, 2009. La Nuit d’enfer (texte de Joseph Moncure), Flammarion, 1996.

Stein (L’Aventure des) : Matisse, Cézanne, Picasso

Ce catalogue rend compte des œuvres de tout premier plan, qui appartinrent à l’une des 3 collections de cette famille, et qui furent exceptionnellement rassemblées au Grand Palais à l’occasion de l’exposition "Matisse, Cézanne, Picasso... L’aventure des Stein".

Ces collections réunissaient des pièces maîtresses de Renoir, Cézanne, une soixantaine de Picasso, 25 Matisse, des Bonnard, Vallotton, Laurencin, Masson, Atlan...

Américains de la côte Ouest, les Stein s’installent à Paris au début du XXe s. Gertrude (1874-1946) qui deviendra écrivain, avec son frère Leo (1872-1947) au 27 rue de Fleurus, Michael, l’ainé, avec son épouse Sarah, réside rue Madame.

Ils accueilleront chez eux toute l’avant-garde artistique de cette époque à laquelle Paris illuminait le monde dans l’art en général, et notamment dans les arts plastiques. Picasso, Matisse, Braque, Apollinaire, Man Ray, Gris... mais aussi les écrivains américains comme Hemingway ou Fitzgerald... s’y croisent.

Les Stein comptèrent parmi les premiers acheteurs de Matisse et de Picasso, constituant ainsi d’étonnantes collections d’art moderne.

L’histoire racontée dans ce catalogue permet de comprendre cette famille si surprenante et les raisons de l’ascendant qu’exerçait ses membres sur les artistes dominants de l’époque.

Les Stein ont assez fortement contribué à imposer de nouvelles normes en matière de goût pour l’art moderne, grâce au regard que portait Leo sur les sources de la modernité, ou à leurs échanges avec les grands intellectuels de l’époque.

L’amitié de Gertrude avec Picasso, ses projets échafaudés pour soutenir dans les années 1920-1930 la production "post-cubiste" de Gris, Masson, Braque...

Matisse, Cézanne, Picasso... L’aventure des Stein. Rmn - Grand Palais, 456
pages, 430 illustrations, 26x30cm, couverture reliée avec jaquette, 50€.

Toutankhamon, son tombeau et ses trésors

Il fallait un certain toupet pour présenter au public français, qui avec l’allemand et l’anglais est d’une exigence, d’une absolue demande d’authenticité et d’un snobisme incroyables dès qu’il s’agit d’égyptologie ! Ce fut un succès considérable.

En fait cette exposition a révélé de façon magistrale l’ensemble des objets de cette tombe mythique, et leur positionnement les uns par rapport aux autres lorsque sa découverte fut faite par Howard Carter.

Cette exposition avant Paris avait déjà été montrée à Zurich, Brno, Munich, Barcelone, Madrid, Manchester, et Dublin. Des millions de visiteurs l’ont vue et l’on imagine que sa carrière sera encore longue. Le catalogue permet de conserver en mémoire les images de ses multiples reproductions que les scientifiques ont agréées, comme celles des années d’émotions de la découverte.

Toutankhamon, son tombeau et ses trésors. Éditions Weiss. 132 pages, 18€.

Van Gogh, rêves de Japon

Van Gogh est un des plus célèbre artiste du monde. Il a su toucher par son œuvre un public extrêmement large, alors même qu’il faisait preuve d’une exigence et d’un engagement dans son art si complet et si… voisins de la démence. Et cet homme qui laisse si fortement transparaître dans sa peinture ses fragilités, ses doutes, sa déraison et son tourment, nous étonne une fois de plus en allant puiser ses références vers le Japon, dans un art qui paraîtrait a priori plutôt éloigné de son caractère.

En effet, l’expression picturale de Hiroshige paraît être si solidement campée, sa philosophie repose sur l’évidence d’une telle solidité, sur une composition, une sérénité, et un voyage autant évoqué qu’intérieur si tranquille.

Van Gogh admirait les estampes japonaises, celles d’Hiroshige lui étaient familières. Il collectionnait cet art et l’avait même exposé, pour partager les émotions qu’il lui procurait, dans le bistrot de celle qui fut un temps sa compagne.

Ce livre met en rapport et souligne l’écho et les inspirations éprouvés par Van Gogh, notamment bien sûr dans ses paysages, construits autour d’un système référentiel plus ample au cœur duquel se retrouve, invariablement, traces de la sensibilité, de la tranquillité et de la force d’Hiroshige, qui fut, dit-on plus célèbre au Japon que le grand Hokusaï.

Chaque tableau de Van Gogh est mis en regard, parfois avec un brin d’exagération, avec des détails d’estampes de Hiroshige, mettant ainsi en évidence l’influence exercée par le graveur japonais sur l’œuvre du Hollandais. Mais le propos est utile.

Cette rencontre des contraires est aujourd’hui possible grâce à l’exposition simultanée des œuvres de Van Gogh et de celles de Hiroshige à la Pinacothèque de Paris. Elle permet de se rendre compte que presque tous ses paysages de Van Gog sont construits autour d’un système référentiel au centre duquel se retrouve, invariablement, l’artiste Hiroshige.

Les reproductions des œuvres présentées sont de qualité, et les textes de spécialistes rappellent et racontent l’importance du japonisme sur le travail des artistes de la fin du XIXe siècle, et sur celui de Van Gogh en particulier.

Van Gogh, rêves de Japon, Pinacothèque de Paris, Gourcuff Gradenigo, relié, 176 pages, 49€.

Vertu (Boîtes en or et objets de)

Ce catalogue présente la collection complète des 240 tabatières, boîtes à mouches, à rouge, drageoirs, étuis, nécessaires... conservés au musée Cognacq-Jay, qui est le musée du XVIIIe siècle de la Ville de Paris.

Ces "objets de vertu" ou "de virtuosité", ces bibelots précieux dont cette époque raffolait, sont de véritables chefs-d’œuvre d’invention, de fantaisie et de technique.

En or, que cela soit en totalité ou en partie, enrichis de pierres, d’émail, de nacre... ils rappellent l’excellence des orfèvres au XVIIIe siècle, à Paris d’une part, le centre de production le plus important à l’époque, mais aussi en Angleterre, en Suisse ou en Allemagne.

Un véritable outil de travail d’antiquaires...

Boîtes en or et objets de vertu, Paris Musées, 163 illustrations couleurs, 156 N&B, broché, 402 pages, 44€.

Vinci (Léonard de), la nature et l’invention

Chaque époque à eu son Léonard. La nôtre le voudrait observateur et proche de la nature, nécessité environnementale de notre siècle oblige. Quelle était son approche du monde, de ce qui l’anime, de ses lois et de ses règles ? Fut-il d’abord et avant tout artiste ou savant ?

Comment capter et retracer l’intelligence léonardienne en chemin puis à l’œuvre ? Si l’on choisit cet angle d’attaque pour le mieux comprendre, de la nature à l’invention, comment se décompose l’aventure des savoirs qu’il a pu nous transmettre ?

Léonard de Vinci qui fut tour à tour et tout à la fois dessinateur, peintre, inventeur de machines de guerre et de divertissements, anatomiste, nous fascine. S’appuyant autant sur sa curiosité transdisciplinaire, propre à la Renaissance que sur son ancrage dans les traditions savantes de l’époque, Léonard a embrassé toutes les connaissances, et s’en est repu.

L’observation de la nature, de l’eau à la botanique, de l’anatomie humaine au vol des oiseaux, est omniprésente dans la genèse de ses créations artistiques comme techniques. Ses inventions, décrites et dessinées dans ses fameux carnets et codex, qui portaient son écriture paranoïquement inversée, font de lui un des plus grands ingénieurs et humanistes de la Renaissance.

La méthode de Léonard de Vinci, observateur de toutes choses, nous interroge et nous pose question. Historiens et chercheurs en botanique ou en biorobotique, français et étrangers, explorent les liens étroits que Léonard tissa entre nature, science et technique. S’aidant des écrits et esquisses de l’artiste, ou encore des reconstitutions de ses machines réalisées en maquette dans les Années 1950, ils offrent de ses travaux une vision renouvelée.

Cet ouvrage, dirigé par Patrick Boucheron et Claudio Giorgione, présente des applications scientifiques récentes, encore expérimentales, qui essaient aussi de reproduire des phénomènes ou des états de la nature. À sa manière, Léonard fut un pionnier de cette discipline apparue dans les Années 1960 sous le nom de bioinspiration ou biomimétisme.

Le génie toscan sut s’inspirer du vivant pour innover, lui qui s’était donné la folle ambition de comprendre en les dessinant les rythmes et les lois de l’ébranlement du monde.

Léonard de Vinci, la nature et l’invention. La Martinière / Universcience, 192 pages, 29,90€.

Wolinski (Georges), 50 ans de dessins

Ce catalogue a été réalisé sous la direction de Martine Mauvieux, conservatrice à la BnF et commissaire de l’exposition.

Les textes, particulièrement pertinents et bien écrits sont de Martine Mauvieux (W., un monde suffocant et drôle, hilarant et désespéré, et W., dessinateur de presse), de la psychologue Élisabeth Roudinesco (Wolinski et les femmes), de Cavanna (Un autre W.), de Massin (Le graphisme chez W.), et de sa femme Maryse, qui le décrit comme un reporter de la vie.

Une anecdote rigolote à noter au passage. La grande Élisabeth Roudinesco dans son article W. et les femmes, commentant le dessin Autoportrait assis, lui envoie davantage que des fleurs : " On dirait du Ingres revu et corrigé par Buster Keaton. Planté avec ses yeux ronds et son cigare, nœud papillon et smocking noir année 1950, il trône tel un enfant comblé au milieu de 15 baigneuses hilares et allumées, fièrement assis sur le canapé d’un bordel, sorte de divan freudien en forme de vagin charnu ".

Wolinski, Autoportrait assis. Dessin original, fin des années 1990 © Wolinski

Ce texte sera, n’en doutons pas, une pure délectation, et les collègues en analyse de Madame Rudinesco en savoureront un à un chacun des termes choisis.

Cerise sur le gâteau, on est de surcroit justifiés à s’interroger sur l’identité de la 15e des " baigneuses hilares et allumées ", car, si vous les recomptez, vous verrez bien qu’elles ne sont que 14... Wolinski, il est une fois de plus démontré que tu as su rester un personnage troublant !

En coédition par Hoëbeke et la BnF. 160 pages, 400 dessins, 29,50€.

En revanche Le Pire a de l’avenir, également de Wolinski, et publié en mai au Cherche-Midi (petit format, mais 928 p., 23,90€) rassemble quelques textes autobiographiques ou pensées de profondeurs variables, et pas mal de dessins dont des inédits.

Yue Minjun, l’Ombre du fou rire

Cette exposition est la première monographique d’importance en Europe sur cet artiste chinois de grande influence.

Avec près de 130 reproductions couleur et noir et blanc de dessins et de tableaux, le catalogue Yue Minjun, L’Ombre du fou rire met en lumière l’œuvre de l’artiste, en explorant l’iconographie si particulière qu’il a développée depuis une vingtaine d’années.

Les contributions significatives du poète et critique chinois Ouyang Jianghe et du philosophe et sinologue français François Jullien, ainsi bien sûr que l’entretien avec l’artiste Yue Minjun lui-même, permettent d’approcher son travail d’un point de vue nouveau et plus complet, et d’approfondir enfin les références à l’histoire de l’art et tout simplement aussi à l’histoire de la Chine qui nourrissent son œuvre.

Avec de tels artistes, le régime chinois est invité, dans la bonne humeur, à réorienter l’Empire... vers de meilleures options...

Ce catalogue concourra pour le Prix CatalPa 2013.

Yue Minjun, L’Ombre du fou rire, Fondation Cartier pour l’art contemporain, Paris, bilingue français / anglais, relié, 23x28,4 cm, 276 pages, textes de Ouyang Jianghe et François Jullien, entretien avec Yue Minjun, 37€.

À suivre avec :
PARIS 2013 : les meilleurs catalogues d’expositions de Paris.

André Balbo

sources : éditeurs, musées, éditeurs, musées

Informations pratiques
Adresse, horaires, numéro de téléphone, liens...

lundi 6 mai 2019,    Expositions